1La question ici abordĂ©e concerne l'organisation dynamique du territoire brĂ©silien dans ses rapports avec les changements sociaux et politiques. Le thème est vaste Ă©tudier la diffĂ©renciation spatiale du BrĂ©sil et y lire la transcription gĂ©ographique des inĂ©galitĂ©s sociales. En rĂ©alitĂ©, l'objectif du propos est Ă la fois limitĂ© et ambitieux. LimitĂ© car il ne s'agit pas ici de rappeler des inĂ©galitĂ©s rĂ©gionales connues. Ambitieux car il s'agit de combiner les diffĂ©rentes Ă©chelles gĂ©ographiques auxquelles fonctionnent les inĂ©galitĂ©s socio-spatiales et de rĂ©flĂ©chir aux outils thĂ©oriques susceptibles d'en permettre l'intelligence. 2Quelques mots-clĂ©s peuvent cadrer la dĂ©marche inĂ©galitĂ©, intĂ©gration, exclusion, sĂ©grĂ©gation, cohĂ©sion, fragmentation. S'il y a inĂ©galitĂ© sociale, celle-ci peut en effet recouvrir des relations très dissemblables entre les partenaires y a-t-il intĂ©gration dans un jeu oĂą le fort reste proche du faible pour mieux le dominer, ou exclusion sociale, le riche mettant une barrière entre lui et le pauvre ? Le lien social intĂ©grateur va-t-il de pair avec une certaine cohĂ©sion territoriale, et l'exclusion sociale avec la sĂ©grĂ©gation, la frontière, la discontinuitĂ© ? Ou faut-il parler de fragmentation territoriale Ă analyser dans une approche pluriscalaire ? Enfin, si le social se croise avec le spatial, la dimension du temps doit aussi ĂŞtre prĂ©sente pour les hĂ©ritages que l'histoire a laissĂ©s et leur recomposition avec les donnĂ©es d'aujourd'hui. 3L'organisation de l'espace disant l'inĂ©galitĂ© sociale, la renforçant et contribuant Ă sa reproduction, faut-il Ă ces mots-clĂ©s ajouter celui de justice socio-spatiale ? Doit-on Ă©tudier les inĂ©galitĂ©s sur le seul plan de l'analyse, en dĂ©crivant les faits et en proposant leur explication, ou peut-on donner Ă ces inĂ©galitĂ©s une qualification Ă©thique et les apprĂ©cier au regard de valeurs ? Le mĂ©lange des registres ne serait pas sans danger s'il Ă©tait implicite et mĂŞlait sans mĂ©thode le discours scientifique et le discours de jugement. En revanche, peut ĂŞtre dĂ©fendue comme lĂ©gitime une approche qui dit clairement Ă quelle thĂ©orie de la justice elle se rĂ©fère et au nom de quels principes elle apprĂ©cie les rĂ©alitĂ©s. Pourquoi la philosophie morale devrait-elle ĂŞtre confisquĂ©e par les seuls philosophes et n'avoir pas sa place dans les sciences sociales ? Penser le territoire Ă la lumière de la philosophie morale et politique 4Si la gĂ©ographie est la science de la diffĂ©renciation spatiale, force est de constater que la diffĂ©rence renvoie Ă plusieurs significations possibles. Que le territoire ne soit pas homogène, c'est une Ă©vidence dictĂ©e par les donnĂ©es physiques et les contraintes Ă©conomiques. Outre la rĂ©partition des potentiels naturels, nombre d'activitĂ©s ont nĂ©cessairement une localisation ponctuelle et ne pourraient ĂŞtre distribuĂ©es d'une manière uniforme dans l'espace. Constat d'une manifeste banalitĂ©, mais plutĂ´t rĂ©jouissant quel ennui produirait la planète si elle n'Ă©tait variĂ©e et si, allant ailleurs, on rencontrait le semblable au lieu d'ĂŞtre confrontĂ© au dĂ©paysement et Ă l'altĂ©ritĂ© ! La vĂ©ritable question porte donc sur le sens social des diffĂ©rences qui existent entre les lieux et entre les hommes la diffĂ©rence est-elle la diversitĂ© dans l'Ă©galitĂ© ? Quand la diffĂ©rence devient-elle inĂ©galitĂ© ? Quand l'inĂ©galitĂ© devient-elle injustice ? 5La prĂ©sente rĂ©flexion s'appuie sur la ThĂ©orie de la Justice de John Rawls 1987. Sans prĂ©tendre la rĂ©sumer en quelques lignes, il est nĂ©cessaire pour la suite du propos d'en rappeler les lignes maĂ®tresses et d'exposer en quoi elle peut s'avĂ©rer fĂ©conde en gĂ©ographie. Le pari ici tenu est en effet que la philosophie morale constitue un outil pour penser le territoire Bret, 2000 ; 2001. 1 J'ai tentĂ© de gĂ©nĂ©raliser et de porter Ă un plus haut niveau d'abstraction la thĂ©orie tradi-tionne ... 2 Pour que les principes retenus atteignent le plus haut niveau d'abstraction et aient ainsi une val ... 6Dans une perspective kantienne qui vise Ă l'universalitĂ©, John Rawls pense la justice non pas comme Ă©galitarisme, mais comme optimisation des inĂ©galitĂ©s. C'est en quoi sa thĂ©orie, bien qu'elle porte sur l'organisation de la sociĂ©tĂ©, peut s'avĂ©rer prĂ©cieuse pour apprĂ©hender le territoire, mentionnĂ© plus haut comme diffĂ©renciĂ© et porteur d'inĂ©galitĂ©s. Dans la tradition des philosophies du contrat1, John Rawls Ă©nonce en ces termes les deux principes fondamentaux de la justice comme Ă©quitĂ©2 7- en premier lieu chaque personne doit avoir un droit Ă©gal au système le plus Ă©tendu de libertĂ©s de base Ă©gales pour tous qui soit compatible avec le mĂŞme système pour les autres ; 8- en second lieu les inĂ©galitĂ©s sociales et Ă©conomiques doivent ĂŞtre organisĂ©es de façon que, Ă la fois, a l’on puisse raisonnablement s’attendre Ă ce qu’elles soient Ă l’avantage de chacun, et b qu’elles soient attachĂ©es Ă des positions et Ă des fonctions ouvertes Ă tous Rawls, 1987, p. 91. 9Le premier principe jouit d'une prioritĂ© sur le second et ne peut donc ĂŞtre enfreint pour que le second soit satisfait. Le second principe, que John Rawls appelle le principe de diffĂ©rence, dit Ă quelles conditions l'inĂ©galitĂ© est compatible avec la justice que tous aient accès Ă toutes les positions sociales dans des conditions Ă©gales, ce qui exclut les sociĂ©tĂ©s de castes, et que tous tirent un mieux-ĂŞtre des inĂ©galitĂ©s existantes. Ce dernier point est d'une importance capitale. Il signifie que, pour ĂŞtre conforme Ă la justice, l'inĂ©galitĂ© doit ĂŞtre telle qu'elle maximise le sort de ceux qui ont le minimum le critère du maximin dit si l'inĂ©galitĂ© satisfait au principe de diffĂ©rence. La dĂ©finition de l'injustice s'en dĂ©duit en toute logique l'injustice est alors simplement constituĂ©e par les inĂ©galitĂ©s qui ne bĂ©nĂ©ficient pas Ă tous Rawls, 1987, p. 93. S'affichant d'une manière explicite comme une alternative Ă l'utilitarisme, la thĂ©orie rawlsienne apporte avec la notion de maximin une contribution fondamentale Ă la justice distributive. DĂ©finissant les biens premiers comme tout ce qu'on suppose qu'un ĂŞtre rationnel dĂ©sirera Rawls, 1987, p. 122, John Rawls place sous ce terme les droits, les libertĂ©s et les possibilitĂ©s offertes, les revenus et la richesse et parle Ă leur propos de biens sociaux premiers puisqu'ils rĂ©sultent de l'organisation sociale et qu'ils doivent ĂŞtre distinguĂ©s des biens premiers naturels que sont la santĂ© et les talents. Ce sont d'ailleurs la diversitĂ© et l'inĂ©galitĂ© dans la dotation des biens premiers naturels qui rendent nĂ©cessaire une règle dĂ©terminant l'accès Ă©quitable aux biens sociaux premiers. Enfin, John Rawls, Ă©nonce le principe de rĂ©paration selon lequel doivent ĂŞtre rĂ©parĂ©es les inĂ©galitĂ©s qui ne profitent pas Ă tous et qui sont donc des injustices ce principe affirme que, pour traiter toutes les personnes de manière Ă©gale, pour offrir une vĂ©ritable Ă©galitĂ© des chances, la sociĂ©tĂ© doit consacrer plus d'attention aux plus dĂ©munis quant Ă leurs dons naturels et aux plus dĂ©favorisĂ©s socialement par la naissance Rawls, 1987, p. 131. Ce principe donne leur lĂ©gitimitĂ© aux discriminations positives. 10Ce bref rappel Ă©tait nĂ©cessaire. Reste Ă montrer que cette thĂ©orie offre un cadre permettant de penser l'espace. D'un intĂ©rĂŞt majeur pour toute rĂ©flexion sur le dĂ©veloppement inĂ©gal et sur le territoire en tant qu'espace social inĂ©galement dĂ©veloppĂ©. Elle aide ici Ă formuler les questions essentielles sur le BrĂ©sil de ces dernières dĂ©cennies comment rĂ©partir la richesse produite ? Faut-il sacrifier une classe sociale pour assurer le dĂ©marrage de la croissance ? Une distribution moins inĂ©galitaire du revenu est-elle un danger pour la maximisation du produit total ? Est-ce vrai, le cas Ă©chĂ©ant, dans la seule phase historique de l'accumulation initiale ou cela le reste-t-il une fois enclenchĂ© le processus de croissance cumulative ? 11Si la thĂ©orie rawlsienne ne retient pas l'Ă©galitarisme comme principe de justice, l'idĂ©e d'Ă©galitĂ©, elle, reste au cĹ“ur de sa problĂ©matique. Pour la justice comme Ă©quitĂ©, l'inĂ©galitĂ© des conditions matĂ©rielles n'est admissible que si elle profite d'abord aux plus pauvres, c'est le principe du maximin, mais aussi sous la double rĂ©serve que, d'une part, l'accès des positions sociales soit ouvert Ă tous dans des conditions Ă©gales et, d'autre part, que soit satisfait le premier principe de justice, lequel, attribuant un droit Ă©gal au système le plus Ă©tendu de libertĂ©s de base Ă©gales pour tous, pose l'Ă©galitĂ© de la valeur intrinsèque des personnes. Cette affirmation est capitale pour l'organisation de la vie en commun, elle fonde la culture dĂ©mocratique et implique aussi que l'inĂ©galitĂ© des conditions matĂ©rielles soit contenue dans des limites compatibles avec l'exercice effectifs des libertĂ©s. 12La question de savoir si l'inĂ©galitĂ© territoriale peut ĂŞtre qualifiĂ©e d'injuste Ă©tend donc Ă l'espace le principe du maximin l'unitĂ© territoriale la plus pauvre est-elle appauvrie par la concentration de la richesse dans l'unitĂ© territoriale la plus riche, ou la première gagne-t-elle par entraĂ®nement au fait que la seconde soit mieux lotie ? PaupĂ©risation absolue dans un cas, et relative dans l'autre. Ou encore, peut-ĂŞtre, pĂ©riphĂ©rie dominĂ©e dans un cas et intĂ©grĂ©e dans l'autre. L'application du maximin conduit-elle Ă utiliser l'inĂ©galitĂ© comme moteur du dĂ©veloppement, et comment ? Le principe de rĂ©paration est-il mis en Ĺ“uvre par l'amĂ©nagement du territoire ? La complexitĂ© de la configuration rĂ©side dans le fait que les territoires sont occupĂ©s par des sociĂ©tĂ©s globales elles-mĂŞmes diffĂ©renciĂ©es en groupes sociaux aux intĂ©rĂŞts divergents, d'oĂą il s'ensuit que la compĂ©tition sociale interfère avec les enjeux territoriaux. Mais cette difficultĂ© prĂ©sente l'intĂ©rĂŞt de maintenir au centre du raisonnement l'attention aux conditions socio-politiques dans lesquelles les rĂ©sultats Ă©conomiques sont atteints, car l'ordre des principes exige d'abord le respect des personnes et l'Ă©galitĂ© de tous dans l'accès aux libertĂ©s. Une intĂ©gration traditionnelle au service d'un modèle social inĂ©galitaire 13Parce qu'il a pour contraire l'exclusion, le terme intĂ©gration bĂ©nĂ©ficie souvent d'un a priori favorable. Il semble signifier la soliditĂ© du lien social et trouver son rĂ©pondant gĂ©ographique dans l'idĂ©e de cohĂ©sion territoriale. Or, cette interprĂ©tation univoque masque l'ambiguĂŻtĂ© du mot. Signifiant le renforcement des liens existant entre les Ă©lĂ©ments d'un système, l'idĂ©e d'intĂ©gration, quand elle s'applique aux groupes humains, exprime certes l'Ă©troitesse du lien social. Mais elle ne dit rien sur la nature de ce lien, ce qui interdit de lui attribuer sans examen une qualification positive. Ă€ la limite, l'intĂ©gration maximum existe dans les sociĂ©tĂ©s de type holiste oĂą chacun ne vaut que par sa participation au groupe dans le rĂ´le qui lui y est dĂ©volu sociĂ©tĂ© oppressive qui nie l'individu et le prive de cette libertĂ© essentielle qu'est la formulation d'un projet de vie. En rĂ©action, l'individualisme doit ĂŞtre saluĂ© comme une promotion des personnes. Ce n'est pas contradictoire avec l'idĂ©e d'intĂ©gration sociale, mais alors d'une nature diffĂ©rente, fondĂ©e sur une dynamique oĂą chacun, reconnu pour lui-mĂŞme comme un acteur social, peut choisir et agir. 14Il vaut donc la peine d'interroger l'intĂ©gration sociale. L'observation de l'espace social d'aujourd'hui, avec ce qu'il traĂ®ne d'hĂ©ritage du passĂ©, peut y aider. Le lien social vertical se lit dans l'organisation de l'espace social local InterfĂ©rence des lieux et interfĂ©rence des temps approche pluriscalaire et rĂ©fĂ©rence Ă des pĂ©riodes historiques diverses pour apprĂ©hender l'espace social 3 C'est le quarto empregada. 4 EmployĂ©es est volontaire-ment mis au fĂ©minin ce sont systĂ©matiquement des fem-mes les empregada ... 15Espace privĂ© par excellence, le logement informe sur la sociĂ©tĂ©. Le contraste entre les immeubles dotĂ©s du confort et l'habitat prĂ©caire des favelas est ce qui frappe d'abord. Il en sera question plus loin. Doit ĂŞtre notĂ© auparavant, Ă une autre Ă©chelle, le plan des logements individuels eux-mĂŞmes dans les immeubles urbains il n'est pas d'appartement destinĂ© Ă la clientèle aisĂ©e ou aux classes moyennes qui ne compte une ou deux chambres de bonne3. Il est vrai que les usages Ă©voluent avec le temps et que certains jeunes mĂ©nages, mĂŞme disposant de revenus confortables, prĂ©fèrent s'organiser sans domestique Ă demeure. La baisse des prix de l'Ă©lectro-mĂ©nager les y encourage, comme le fait que les employĂ©es4 dĂ©fendent aujourd'hui mieux leurs droits que par le passĂ©. Mais la raison essentielle de ces nouveaux comportements, encore minoritaires, rĂ©side dans la volontĂ© de rompre avec des usages oĂą il Ă©tait inconcevable de tenir son rang, fĂ»t-il moyen, sans avoir Ă disposition quelqu'un Ă son service. 5 MalgrĂ© l'exiguĂŻtĂ©, la chambre de bonne garantit une habitabilitĂ© meilleure que bien d'autres logem ... 6 Le plus cĂ©lèbre fut celui de Palmares, dans l'État actuel de l'Alagoas. 7 Le 20 novembre est chaque annĂ©e au BrĂ©sil le jour de la conscience noire, en souvenir de la mort d ... 16Le prĂ©sent fait ici Ă©cho au passĂ© la chambre de bonne d'aujourd'hui, quelques mètres carrĂ©s donnant sur la cuisine5, est l'hĂ©ritière de la senzala de l'esclave d'autrefois. Le sociologue Gilberto Freyre avait magnifiquement dĂ©crit la sociĂ©tĂ© coloniale et l'avait rĂ©sumĂ©e dans l'opposition entre la casa grande - la maison du maĂ®tre - et la senzala - la maison de l'esclave Freyre, 1974. Ce rappel historique Ă©claire la question ici traitĂ©e l'intĂ©gration sociale examinĂ©e dans ses rapports avec la qualitĂ© du lien social. Est-il un système social qui intègre plus que celui oĂą le travailleur est la propriĂ©tĂ© de son maĂ®tre ? Et en est-il de plus injuste, de plus attentoire Ă la libertĂ© individuelle et aux droits de l'homme ? C'est prĂ©cisĂ©ment de n'avoir pas assez soulignĂ© ce point qui a Ă©tĂ© parfois reprochĂ© Ă Gilberto Freyre. Son analyse, brillante et dite dans une langue superbe, prĂ©sentait un BrĂ©sil colonial fondĂ© sur la conciliation des hommes plus que sur l'affrontement des groupes sociaux alors que les tentatives des esclaves pour secouer le joug de l'oppression ont Ă©tĂ© nombreuses. Les quilombos6, refuges d'esclaves marrons, constituaient autant d'espaces de libertĂ© pour ceux qui avaient fui les plantations. L'idĂ©e d'une Ă©mancipation des Noirs devait venir plus tard, et, pendant longtemps, il n'Ă©tait pas possible de se libĂ©rer sans inscrire cette libertĂ© en un lieu, c'est-Ă -dire sans s'Ă©vader de la terre de servitude pour crĂ©er ailleurs un territoire soustrait Ă l'ordre colonial. Eloquente illustration de l'intĂ©gration comme injustice Ă quoi ne pouvait rĂ©pondre qu'une exclusion volontaire. Le souvenir de la rĂ©sistance noire conquiert peu Ă peu sa place dans la culture politique du BrĂ©sil7 car le fait majeur de la pĂ©riode esclavagiste a bien Ă©tĂ©, par dĂ©finition, l'esclavage intĂ©grer pour asservir. 8 Morador vient du verbe morar qui signifier habiter le morador travaille sur le grand domaine et ... 17L'organisation du grand domaine agricole a prolongĂ©, après la libĂ©ration des esclaves, le lien social vertical qui lie celui qui a la terre et celui qui la travaille. Ce fut le système de la moradia dans lequel le morador8 cultive la terre du maĂ®tre contre l'usufruit d'un lopin de terre. Perdure dans la moradia la dĂ©pendance personnelle du pauvre envers le riche, c'est-Ă -dire la forte intĂ©gration sociale dans une situation d'injustice. Le lien social reste ici un lien de domination, et l'espace social demeure pour le dominĂ© un espace clos, limitĂ© au grand domaine. C'est un espace privĂ© oĂą se nouent pourtant les relations entre les acteurs sociaux, en cohĂ©rence avec un système social paternaliste oĂą le dominant sert de mĂ©diateur au dominĂ© pour son insertion dans l'espace public, son devenir social et son expression politique. L'organisation territoriale nationale 18La genèse de la sociĂ©tĂ© brĂ©silienne est intimement liĂ©e Ă la formation de son territoire Droulers, 2001. 9 Le traitĂ© de Tordesillas date de 1494, deux ans après la dĂ©couverte du nouveau monde et six ans av ... 19Deux processus ont permis que la nation prenne pleinement possession de son espace. Le premier est la conquĂŞte de l'Ouest. Les bandeirantes, fondateurs horizontaux du BrĂ©sil, ont pĂ©nĂ©trĂ© le sertĂŁo Ă partir du littoral tĂ´t occupĂ© par les fondateurs verticaux qu'avaient Ă©tĂ© les planteurs. Leur aventure mettait en Ĺ“uvre ce souci constant des autoritĂ©s portugaises puis brĂ©siliennes de repousser le mĂ©ridien, c'est-Ă -dire d'aller au-delĂ de la limite que l'Espagne et le Portugal avaient fixĂ©e arbitrairement Ă leurs ambitions respectives lors du TraitĂ© de Tordesillas avant mĂŞme que le BrĂ©sil ne fĂ»t dĂ©couvert9 ! L'incorporation de terres nouvelles a rĂ©alisĂ© l'intĂ©gration de l'intĂ©rieur dans un territoire contrĂ´lĂ© par les Ă©lites sociales de la cĂ´te. Le second processus, plus rĂ©cent, a Ă©tĂ© l'intĂ©gration des rĂ©gions dans un espace Ă©conomique cohĂ©rent. Les diffĂ©rentes rĂ©gions ont en effet longtemps entretenu des relations directes avec l'Europe davantage que des relations entre elles. Le profil exportateur de leurs Ă©conomies respectives les y poussait, tout comme la prĂ©caritĂ© des transports intĂ©rieurs. C'Ă©tait l'Ă©poque de l'archipel brĂ©silien Thery, 2000. Puis vint un moment oĂą les relations entre les rĂ©gions se sont intensifiĂ©es et oĂą l'archipel s'est fait continent selon l'expression d'Aroldo de Azevedo 1968. 20IntĂ©gration Ă©conomique donc, et aussi intĂ©gration territoriale. L'intĂ©gration sociale a-t-elle progressĂ© dans le mĂŞme temps ? Sans doute, car le phĂ©nomène bandeirante a fait corps avec l'identitĂ© nationale et a consolidĂ© chez les BrĂ©siliens le sentiment d'une commune appartenance Ă une terre. Mais, paradoxe tĂ©moignant de l'aliĂ©nation sociale que peut vĂ©hiculer la territorialitĂ©, alors que tous partageaient le sentiment d'appartenir Ă une terre, la terre, elle, Ă©tait la propriĂ©tĂ© de quelques-uns seulement ! La perception du territoire Ă l'Ă©chelle nationale se combinait ainsi avec des structures foncières excluant de la propriĂ©tĂ© du sol la majeure partie de la population. 21L'histoire a donc laissĂ© en hĂ©ritage une vĂ©ritable nation HĂ©rodote, n°98, 2000. Mais l'intĂ©gration sociale y a plus servi l'injustice que l'Ă©quitĂ©. Modernisation et justice socio-spatiale 22Questionner les inĂ©galitĂ©s socio-spatiales au cours des dernières dĂ©cennies, c'est se demander si l'intĂ©gration sociale a continuĂ© Ă jouer son rĂ´le de domination et de contrĂ´le social ou si sa fonction s'est modifiĂ©e dans le sens d'une plus grande solidaritĂ©. C'est aussi s'interroger sur les transformations spatiales qui ont enregistrĂ© les changements sociaux, les ont consolidĂ©s et les ont peut-ĂŞtre amplifiĂ©s. 23Brasilia donne ici matière Ă rĂ©flexion. En Ă©tablissant la nouvelle capitale sur les austères plateaux du Goias, le PrĂ©sident Juscelino Kubitschek relançait la tradition bandeirante et crĂ©ait Ă l'intĂ©rieur un point d'ancrage utile Ă la mise en valeur de l'Ouest. La localisation mĂŞme du nouveau district fĂ©dĂ©ral symbolisait l'unitĂ© nationale au partage des eaux du SĂŁo Francisco Ă l'Est, du Parana au Sud et du Tocantins au Nord-Ouest, Brasilia se situe Ă la soudure des grandes rĂ©gions naturelles et humaines du pays et constitue le lieu idĂ©al pour organiser l'intĂ©gration du BrĂ©sil pauvre, le Nordeste, et du BrĂ©sil riche, le Sudeste et le Sud, avec le BrĂ©sil pionnier de l'Amazonie. Mais, pour essentiel qu'il soit Ă l'intĂ©gration du territoire national, ce lieu, dans les limites du district fĂ©dĂ©ral, donne Ă voir le spectacle de la sĂ©grĂ©gation et de l'exclusion sociale. C'Ă©tait rĂŞverie de croire que la nouvelle capitale pourrait symboliser aussi l'harmonie sociale cette ville est Ă l'image du pays dont elle est la tĂŞte. Aussi, l'inĂ©galitĂ© sociale s'y lit-elle d'une façon particulièrement nette les classes privilĂ©giĂ©es dans le plan-pilote de Lucio Costa et Oscar Niemeyer, les classes moyennes et dĂ©favorisĂ©es dans les villes satellites Ă plusieurs dizaines de kilomètres, et les plus pauvres, enfin, dans des favelas. 24Le BrĂ©sil s'est ainsi modernisĂ© en combinant deux processus contradictoires - l'intĂ©gration et l'exclusion - perceptibles chacun Ă plusieurs Ă©chelles et appliquĂ©s Ă la sociĂ©tĂ© comme au territoire. La modernisation conservatrice et l'espace social 25IntĂ©gration et exclusion, le modèle brĂ©silien de croissance a portĂ© Ă son paroxysme cette singulière association, quand, autour des annĂ©es 1970, on a parlĂ© du miracle brĂ©silien, apparent succès Ă©conomique utilisĂ© par les militaires au pouvoir de 1964 Ă 1985 pour revendiquer une lĂ©gitimitĂ©, comme si un taux de croissance pouvait supplĂ©er le verdict des urnes ! 26La vĂ©ritable question Ă poser est celle-ci croissance pour qui ? La haute conjoncture s'alimentait d'une large ouverture aux capitaux Ă©trangers et d'un gros effort Ă l'exportation, deux choix requĂ©rant une sĂ©vère contention des salaires, que le dumping social serve Ă attirer les entreprises extĂ©rieures ou qu'il rende les exportations plus compĂ©titives Ă l'Ă©tranger. La pĂ©riode est ainsi caractĂ©risĂ©e par une concentration des revenus, d'autant que le rĂ©gime voulait favoriser les classes moyennes urbaines dans l'espoir, pas toujours déçu, de s'assurer leur soutien. De toutes les façons, il Ă©tait cohĂ©rent d'Ă©lever le pouvoir d'achat de ces classes sociales pour soutenir la construction automobile et, plus gĂ©nĂ©ralement, les industries de biens de consommation durable. CohĂ©rent, mais injuste puisque l'inĂ©galitĂ© dans la distribution des revenus n'Ă©tait pas rĂ©alisĂ©e dans le but de tirer les plus pauvres vers le haut et contrevenait donc fondamentalement au principe du maximin. 27On avait parlĂ© de miracle, mais la vĂ©ritĂ© est qu'il n'y eut pas de miracle face au premier choc pĂ©trolier de 1973 malgrĂ© une capacitĂ© d'adaptation remarquable en matière Ă©nergĂ©tique, ni face au second de 1979, et pas davantage devant la crise de la dette des annĂ©es 1980. Comme dans toute l'AmĂ©rique latine, ce furent les annĂ©es de la dĂ©cennie perdue pour la croissance, mais gagnĂ©e pour la dĂ©mocratie. L'incapacitĂ© des gouvernants Ă rĂ©soudre la crise leur Ă´tait le simulacre de lĂ©gitimitĂ© qu'ils avaient cherchĂ© dans la croissance, et les jours du rĂ©gime Ă©taient dès lors comptĂ©s. 28Dit maintes fois, le fait doit ĂŞtre ici rappelĂ© la pĂ©riode militaire a Ă©tĂ© rĂ©actionnaire sur le plan social, mais elle a modernisĂ© le BrĂ©sil dans de nombreux domaines. Imposant au pays une marche forcĂ©e vers la puissance Ă©conomique et l'affirmation sur la scène internationale, le rĂ©gime autoritaire voyait en effet dans l'aggravation des inĂ©galitĂ©s internes le moyen d'assurer la puissance externe certains groupes sociaux, certaines entreprises, certains lieux devaient ĂŞtre favorisĂ©s pour se hisser au niveau du premier monde, sans considĂ©ration pour ceux des BrĂ©siliens qui ne suivraient pas et s'en trouveraient marginalisĂ©s. L'expression de modernisation conservatrice peut donc ĂŞtre appliquĂ©e Ă ce processus une modernisation qui ne se rĂ©alise pas dans l'intĂ©rĂŞt des plus pauvres. Autant dire plus explicitement modernisation de l'injustice Bret, 2000, p. 340. Les Ă©chelles gĂ©ographiques de l'injustice 29L'approche pluriscalaire se rĂ©vèle lĂ encore de bonne mĂ©thode, pas tellement parce qu'elle permettrait de voir les phĂ©nomènes Ă des niveaux de dĂ©tail plus ou moins fins, mais parce qu'elle fait apparaĂ®tre selon les Ă©chelles d'analyse des acteurs institutionnels et sociaux distincts et des intĂ©rĂŞts divergents. 30Ă€ l'Ă©chelle nationale, l'idĂ©e d'intĂ©gration Ă©tait plus que jamais Ă l'ordre du jour sous les militaires. ConsacrĂ©e en 1970 par un Plan d'intĂ©gration nationale, elle se trouvait au centre du projet territorial du Second plan de dĂ©veloppement 1975-1979. L'idĂ©e Ă©tait d'articuler de façon plus efficace les potentialitĂ©s complĂ©mentaires des diffĂ©rentes rĂ©gions du pays. Que cela ait Ă©tĂ© alors un moyen pour taire les racines sociales des difficultĂ©s du Nordeste atteint par une grave sĂ©cheresse en 1970 n'est pas douteux situer le remède ailleurs permettait de dĂ©placer la crise de la sphère sociale et donc du registre politique vers le registre apparemment technique de la construction des routes sur les terres vides de l'Amazonie. De plus, renouer avec la tradition pionnière Ă©tait bien de nature Ă flatter une opinion publique sensible au thème d'un Brasil Grande engagĂ© dans une aventure promĂ©thĂ©enne qui consoliderait sa souverainetĂ© et le confirmerait comme une puissance qui compte dans le monde. 31Dans la continuitĂ© de ce que le rĂ©gime antĂ©rieur avait fait Ă Brasilia, l'opĂ©ration lancĂ©e alors en Amazonie ne peut certes pas ĂŞtre critiquĂ©e a priori dans son principe car occuper humainement et Ă©conomiquement les rĂ©gions de l'Ouest et mieux les incorporer au reste du territoire brĂ©silien est un objectif d'une utilitĂ© peu contestable. Le problème ici discutĂ© se situe sur un tout autre plan il est de savoir si l'idĂ©e d'intĂ©gration nationale a Ă©tĂ© utilisĂ©e pour servir la cohĂ©sion sociale dans une plus grande justice, ou, au contraire, si elle a Ă©tĂ© instrumentalisĂ©e au service du conservatisme social. Ă€ l'Ă©chelle nationale, il est bien vrai que l'Amazonie a Ă©tĂ© arrimĂ©e au reste du territoire par un rĂ©seau de circulation cohĂ©rent et insĂ©rĂ©e dans l'Ă©conomie du pays l'intĂ©gration nationale a Ă©tĂ© rĂ©ussie. Mais Ă cette intĂ©gration territoriale nationale fait contraste une exclusion sociale et une fragmentation des territoires rĂ©gionaux et locaux. 32Comme le montre le Nordeste, l'idĂ©e d'intĂ©gration nationale Ă©tait largement contradictoire avec celle d'intĂ©gration rĂ©gionale. Elle devait mĂŞme entraĂ®ner la dĂ©structuration du territoire rĂ©gional et sa restructuration au sein d'un ensemble gĂ©ographique plus vaste dans lequel il perdait une part de son identitĂ©. 33La politique d'amĂ©nagement lancĂ©e en 1960 par Juscelino Kubitschek et mise en Ĺ“uvre dans le Nordeste par Celso Furtado avait consistĂ© Ă dĂ©velopper la rĂ©gion Ă coup d'investissements publics et de soutiens publics aux investissements privĂ©s, mais elle appelait des transformations sociales - la rĂ©forme agraire et la redistribution du revenu - susceptibles de permettre la diffusion de la croissance Ă partir des agglomĂ©rations urbaines bĂ©nĂ©ficiaires des investissements initiaux, en particulier industriels. En d'autres termes, dans la prĂ©vision que les villes les plus importantes de la rĂ©gion - Recife, Salvador et Fortaleza - deviennent de vĂ©ritables pĂ´les de dĂ©veloppement, il Ă©tait attendu que les effets multiplicateurs des investissements se rĂ©alisent dans le Nordeste lui-mĂŞme et l'entraĂ®nent dans une dynamique de croissance. Dans une formulation rawlsienne, ce scĂ©nario apparaĂ®t juste car il aurait optimisĂ© les inĂ©galitĂ©s de façon que les rĂ©gions de l'intĂ©rieur bĂ©nĂ©ficient des retombĂ©es des opĂ©rations conduites dans les espaces urbains du littoral et soient ainsi tirĂ©es vers le haut. Cette politique Ă©tait en phase avec l'orientation de la Cepal - Commission Ă©conomique des Nations Unies pour l'AmĂ©rique Latine - et avec les recommandations de l'Alliance pour le Progrès. C'est dire que, malgrĂ© le danger pour l'ordre social qu'y virent ses dĂ©tracteurs les plus conservateurs, elle ne remettait nullement en cause la libre entreprise et le marchĂ©. Mais, l'idĂ©e forte qui l'inspirait Ă©tait que la justice sociale constituait un facteur d'efficacitĂ© pour la modernisation du pays. 34C'est prĂ©cisĂ©ment contre cela que les forces armĂ©es ont pris le pouvoir en 1964. Il Ă©tait inĂ©vitable que l'amĂ©nagement du territoire s'en trouve bouleversĂ©, car la rĂ©gulation Ă©tatique doit maintenir une cohĂ©rence entre l'action sur l'espace et le projet de sociĂ©tĂ© appliquer le principe du maximin dans l'amĂ©nagement du territoire aurait supposĂ© que la promotion des plus modestes fĂ»t un objectif prioritaire. Or, Ă partir de 1964, c'est tout le contraire. Le coĂ»t social Ă©levĂ© - surexploitation des travailleurs et exclusion sociale - Ă©tait tenu pour la rançon nĂ©cessaire au progrès. 10 Les micro-rĂ©gions sont au BrĂ©sil des unitĂ©s territoriales qui regroupent plusieurs municipes Ă des ... 35Pour ce qui est du Nordeste, la croissance extravertie fit fonctionner les villes du littoral bĂ©nĂ©ficiaires des investissements comme des enclaves. Elles tournent le dos Ă leur environ-nement gĂ©ographique immĂ©diat parce que celui-ci n'offre pas un milieu social, Ă©conomique et culturel rĂ©ceptif Ă la diffusion de la croissance. Elles regardent vers le centre Ă©conomique national, SĂŁo Paulo, d'oĂą viennent les capitaux, avec lequel se sont nouĂ©es les relations interindustrielles et vers oĂą se dirigent les ventes, quand ce n'est pas vers l'Ă©tranger. Ce phĂ©nomène a renforcĂ© la dissymĂ©trie de l'espace nordestin, bien que les autoritĂ©s aient Ă plusieurs reprises appliquĂ© des fonds publics pour dynamiser les villes de l'intĂ©rieur et les rendre capables de fixer les investissements productifs. Ce fut largement en vain ce que l'on est tentĂ© d'appeler la rugositĂ© de l'espace Ă©conomique du Nordeste - sans doute un trait gĂ©ographique caractĂ©ristique du sous-dĂ©veloppement - y a fait obstacle. Des exemples locaux peuvent certes dĂ©mentir un propos exagĂ©rĂ©, mais la tendance lourde consiste bien en une fragmentation territoriale opĂ©rĂ©e entre d'une part les quelques points entraĂ®nĂ©s dans une expansion Ă©conomique initiĂ©e et contrĂ´lĂ©e par le Sudeste, et d'autre part, les vastes zones quasi ignorĂ©es par la croissance. Les chiffres le montrent, et notamment la part que les capitales estaduais occupent dans le produit intĂ©rieur brut de leurs États respectifs. Dans une Ă©tude rĂ©alisĂ©e Ă l'Ă©chelle des micro-rĂ©gions des capitales10, J. R. Vergolino et A. Monteiro Neto 1997 ont mis en Ă©vidence le fait que les capitales nordestines ont confisquĂ© la croissance Fortaleza reprĂ©sentait 53 % du PIB du Ceara en 1970... et 81 % en 1991, Recife 62 % de celui du Pernambouc en 1970… et 77 % en 1991, Salvador 44 % de celui de Bahia en 1970… et 67 % en 1991. Ces chiffres parlent d'eux-mĂŞmes, confirmĂ©s par ceux de SĂŁo Luis dans le MaranhĂŁo, de Teresina dans le Piaui, de Natal dans le Rio Grande do Norte, de JoĂŁo Pessoa dans la Paraiba, de Maceio dans l'Alagoas et d'Aracaju dans le Sergipe ! 36En fait d'intĂ©gration nationale, celle-ci fut donc sĂ©lective Ă l'Ă©chelle rĂ©gionale et mit en place un espace Ă©conomique rĂ©ticulaire qui exclut autant qu'il intègre... au point que, s'agissant du Nordeste, parler d'Ă©conomie rĂ©gionale a perdu beaucoup de son sens. Ailleurs, les effets rĂ©gionaux et locaux de l'intĂ©gration nationale ont variĂ© selon le degrĂ© de dĂ©veloppement du territoire considĂ©rĂ©. Dans le cas de l'État de SĂŁo Paulo, la croissance s'est diffusĂ©e très largement contrairement Ă l'Ă©volution mentionnĂ©e plus haut et selon la mĂŞme source, la part du produit intĂ©rieur brut de la capitale a dĂ©cru entre 1970 et 1991 70 % du PIB estadual en 1970 et 52 % en 1991. Cela ne signifie Ă©videmment pas que la ville de SĂŁo Paulo souffrirait d'un ralentissement Ă©conomique, mais que le dynamisme de ce centre tire vers le haut les villes de l'intĂ©rieur pauliste, Campinas certainement, mais aussi SĂŁo JosĂ© dos Campos sur le rio Paraiba do Sul, RibeirĂŁo Preto, SĂŁo Carlos, Rio Claro et Presidente Prudente, parmi d'autres, sur le plateau occidental. Ce n'est pas tant la proximitĂ© qui vaut Ă l'État de Sao Paulo de partager le dynamisme de sa capitale. C'est l'environnement Ă©conomique, social, culturel qui est porteur et qui offre un milieu favorable au dĂ©veloppement. Toutefois, l'Ă©chelle locale mĂ©rite aussi examen car elle rĂ©vèle des poches de pauvretĂ© relative quasi oubliĂ©es par la croissance, telle la vallĂ©e du rio Ribeira, au Sud-Ouest de l'État. Comme pour parachever la dĂ©monstration, il existe des situations intermĂ©diaires entre les deux situations jusqu'ici dĂ©crites, et c'est le Minas Gerais qui l'occupe. Ă€ la charnière des trois BrĂ©sil, le BrĂ©sil relativement dĂ©veloppĂ© du Sudeste c'est la Mata mineira, le BrĂ©sil dĂ©shĂ©ritĂ© du Nordeste c'est la vallĂ©e du rio SĂŁo Francisco et plus encore celle du rio Jequitinhona et du BrĂ©sil pionnier c'est le Triangulo mineiro, Ă l'Ouest, le Minas Gerais a vu l'Ă©quilibre se maintenir entre son territoire et sa capitale Belo Horizonte qui concentrait 31 % du PIB mineiro en 1970 et 33 % en 1991. 37La fragmentation du territoire exprime-t-elle et renforce-t-elle la dĂ©chirure du tissu social ? C'est sans doute Ă l'Ă©chelle locale, et en particulier celle de l'espace urbain, que l'exclusion est la plus organisĂ©e par ceux qui voient dans le pauvre une menace et la plus ressentie par ceux qui en sont victimes. Il y aurait illusion Ă s'imaginer que les Ă©carts sociaux Ă©taient vĂ©cus autrefois dans la concorde. FondĂ© sur l'inĂ©galitĂ© entre les hommes sans quoi l'ordre colonial n'aurait pas existĂ©, le BrĂ©sil a gardĂ© de ses racines une violence sociale plus ou moins contenue. Mais, on l'a vu, le système traditionnel voulait que cette violence intĂ©gre les catĂ©gories sociales dĂ©favorisĂ©es au lieu de les exclure. Le contrĂ´le social du faible par le puissant passait par le lien social vertical qui mettait le petit dans la dĂ©pendance et sous la protection du grand. L'esclavage d'abord, le clientĂ©lisme ensuite assurèrent la cohĂ©sion sociale au bĂ©nĂ©fice des Ă©lites. 11 En France, les agents immobiliers le savent et attirent la clientèle en prĂ©sentant ces maisons sou ... 1 38Le clientĂ©lisme n'a pas disparu et c'est encore souvent Ă la bienveillance d'un puissant que l'on doit une aide, une terre, un travail ou un logement, autant de faveurs qui appellent en rĂ©ciprocitĂ© une soumission dĂ©fĂ©rente envers le bienfaiteur et parfois un bulletin de vote. Le temps, c'est vrai, rĂ©duit ces pratiques. Toutefois, si les formes anciennes de l'intĂ©gration sociale et territoriale subissent une Ă©rosion, laissent-elles place Ă une intĂ©gration fondĂ©e sur l'idĂ©e dĂ©mocratique d'Ă©galitĂ© des personnes gĂ©nĂ©ratrice de pratiques spatiales Ă©galitaires ? La fragmentation de l'espace urbain suggère une rĂ©ponse nĂ©gative. L'espace privĂ© se ferme Ă l'espace public assimilĂ© Ă un danger parce qu’accessible Ă des individus libĂ©rĂ©s des formes anciennes du contrĂ´le social. L'autre est alors perçu comme un risque, et la rĂ©action normale est de s'en protĂ©ger. On ne compte plus dans les villes brĂ©siliennes les condominios fechados, mot-Ă -mot les copropriĂ©tĂ©s fermĂ©es, c'est-Ă -dire des ensembles rĂ©sidentiels totalement isolĂ©s de l'extĂ©rieur par une barrière physique. Ces condominios fechados ne sont pas le fait des seules classes aisĂ©es. Les classes moyennes adoptent souvent elles aussi ce mode d'habiter qui Ă©vite le contact avec l'espace public. Une autre Ă©volution du marchĂ© immobilier urbain est significative depuis une vingtaine d'annĂ©es la baisse relative du prix des maisons individuelles et la hausse du prix des appartements. A l'inverse du cas gĂ©nĂ©ral oĂą rĂ©sider en ville, mais dans une maison11, est une marque recherchĂ©e de distinction, le souci de la sĂ©curitĂ© dĂ©prĂ©cie les maisons individuelles dans les villes brĂ©siliennes et accroit la demande pour les appartements dans les immeubles collectifs dont l'entrĂ©e est sĂ©vèrement filtrĂ©e12. 13 Il est vrai que certains condominios fechados sont de grande taille et constituent Ă eux seuls des ... 14 Mais pas pour toutes il ne faut pas tomber dans le fantasme dangereux d'une insĂ©curitĂ© gĂ©nĂ©ralis ... 39L'Ă©chelle des quartiers pose la question de la sĂ©grĂ©gation sociale. Le quartier comporte nĂ©cessairement de l'espace public et ne saurait se fermer comme un espace de copropriĂ©tĂ© privĂ©e13. Y a-t-il alors mixitĂ© sociale dans l'espace public, ce dernier Ă©tant vraiment public et permettant que les citadins se croisent dans un espace qui appartient Ă tous, ou au contraire, y a-t-il fermeture sociologique de cet espace dit public, le quartier, Ă dĂ©faut d'ĂŞtre abritĂ© par une barrière physique, Ă©tant alors isolĂ© des autres par une barrière sociale tacitement acceptĂ©e. C'est le risque de ghetto. Ghetto de riches parfois, quand le lieu est intimidant pour le pauvre au point qu'il n'ose y pĂ©nĂ©trer. Ghetto de pauvres souvent quand la favela se ferme Ă l'intrus… Pendant longtemps, pourtant, les favelas n'Ă©taient pas plus fermĂ©es que n'importe quel quartier populaire, malgrĂ© la rupture paysagère qui les dĂ©signe comme singulières. Or, pour certaines d'entre elles14, ce temps n'est plus depuis que des rĂ©seaux mafieux de la drogue en ont fait des zones de non-droit. 15 Les morros sont les collines Ă pentes fortes caractĂ©ristiques du site de Rio de Janeiro sur lesque ... 16 Les BrĂ©siliens ont dĂ©signĂ© l'Ă©vènement sous le nom d'arrastao. 40De nombreux espaces existent Ă l'Ă©vidence oĂą se croisent les citadins de milieux sociaux diffĂ©rents. Mais les villes brĂ©siliennes, Ă©clatĂ©es et parcourues de frontières internes crĂ©ant une sorte d'apartheid social, semblent moins que naguère des territoires de cohĂ©sion sociale. Que, le temps du carnaval et parce que l'inversion des rĂ´les sociaux est dans la logique carnavalesque, les pauvres dĂ©filent et dansent dans les beaux quartiers, c'est une de ces plaisantes transgressions qui apportent du piment Ă la monotonie des jours ordinaires. Que les pauvres frĂ©quentent aussi au quotidien l'espace des classes supĂ©rieures, comment faire autrement dans un système oĂą ces dernières affichent leur supĂ©rioritĂ© par le nombre de leurs serviteurs et dĂ©pendants. En revanche, que les favelados descendent en nombre de leurs morros15 et troublent la tranquillitĂ© des plages Ă©lĂ©gantes des quartiers cossus - c'est ce qui est arrivĂ© le dimanche 18 octobre 1992 sur la plage de l'Arpoador, Ă Rio de Janeiro16 - voilĂ qui est de trop pour les privilĂ©giĂ©s, et le signe pour eux inquiĂ©tant que les pauvres adoptent des pratiques spatiales susceptibles de bousculer l'ordre social. 41A cet Ă©gard, l'usage laxiste au BrĂ©sil du mot marginal pour dĂ©signer celui qui se trouve au bas de l'Ă©chelle sociale est significatif. Le marginal, c'est par dĂ©finition celui qui n'est pas intĂ©grĂ© dans un groupe. Or, le système brĂ©silien ayant produit beaucoup d'exclusion sociale, le marginal devient aussi celui qui a Ă©tĂ© marginalisĂ©, qui a Ă©tĂ© exclu du partage des richesses et dont il y a par consĂ©quent motif de se mĂ©fier. Le mot finit par dĂ©signer indistinctement le dĂ©linquant, celui que l'on soupçonne de le devenir un jour... et celui qui, dans la pauvretĂ©, prĂ©sente le risque de vouloir en sortir. Le modèle Ă©conomique a Ă©cartĂ© certains des fruits de la croissance. Le modèle urbain les exclut des lieux valorisĂ©s et les prive des pratiques qui feraient d'eux des citadins Ă part entière. Le langage, enfin, les stigmatise, et avec eux les lieux oĂą on cherche Ă les confiner. Cercle vicieux que celui-ci, gĂ©nĂ©rateur de violence, et donc de peur, et donc d'enfermement derrière des barrières, et donc de frustrations et d'envie... et donc de violence. Dans un sociĂ©tĂ© atomisĂ©e oĂą les formes anciennes d'encadrement social ont perdu de leur efficacitĂ©, beaucoup se sentent rejetĂ©s par un système qui les maintient dans la pauvretĂ© et qui se mĂ©fie d'eux une situation d'anomie peut apparaĂ®tre, oĂą la règle a disparu et oĂą la nĂ©cessitĂ© de la survie entretient au mieux la dĂ©brouille et au pire la loi de la jungle. 17 Ce fut le cas en 1975 lorsque le plan Proalcool encouragea la production d'alcool-carburant et ouv ... 18 Mot Ă mot, des mange-froid ils mangent un casse-croĂ»te sur le lieu de travail. 42Ă€ la campagne aussi, la modernisation conservatrice a exercĂ© des effets dĂ©vastateurs sur le lien social. Du simple point de vue de la rentabilitĂ© financière des exploitations agricoles, la moradia Ă©tait devenue un système obsolète. Bien que les moradores n'occupent pour leur usage personnel que des surfaces limitĂ©es sur les sols les moins fertiles du domaine, les propriĂ©taires veulent souvent rĂ©cupĂ©rer ces parcelles, surtout les aides publiques permettent de les amender et des rendre productives Ă bon prix17. L'autre avantage du renvoi des moradores pour les propriĂ©taires est de n'avoir pas toute l'annĂ©e une main-d'Ĺ“uvre utile seulement Ă certains moments du calendrier agricole. Dans ces conditions, les moradores ont Ă©tĂ© expulsĂ©s en masse. On les retrouve souvent dans les quartiers pĂ©riphĂ©riques des villes petites et moyennes. Ils sont devenus des journaliers agricoles, des boias-frias18 recrutĂ©s le matin, lorsqu'il y a de l'embauche, et rentrĂ©s le soir chez eux sans l'assurance de travailler le lendemain. La prĂ©caritĂ© constitue leur grand problème. Trouver de l'embauche tous les jours est pour eux impossible c'est prĂ©cisĂ©ment parce qu'on n'a pas besoin d'eux en permanence qu'on les a renvoyĂ©s ! Il faut donc inventer des stratĂ©gies de survie, travailler dans l'agriculture ou en milieu urbain, le plus souvent dans le secteur informel et dans des statuts variables selon les opportunitĂ©s du lieu et du moment. 43Il y a bien modernisation. Modernisation technique puisque des machines ont remplacĂ© des bras. Modernisation sociale aussi puisque le salariat prend le relais des formes archaĂŻques de gestion de la main-d'oeuvre. Mais modernisation conservatrice puisqu'elle ne se fait pas Ă l'avantage des plus modestes, et donc modernisation injuste puisqu'elle contrevient fondamentalement au principe du maximin. L'extrĂŞme flexibilitĂ© du travail en quoi consiste pour l'essentiel la modernisation conservatrice des campagnes produit donc de l'exclusion sociale, concrĂ©tisĂ©e par des populations rejetĂ©es partiellement du travail agricole et non insĂ©rĂ©es pour autant d'une façon stable dans le marchĂ© du travail urbain. Sans regretter la fin d'un système qui, Ă l'injustice de l'exploitation du travail ajoutait celle de la dĂ©pendance personnelle du travailleur, il s'agit de noter que le BrĂ©sil ne s'est pas modernisĂ© en amĂ©liorant les perspectives offertes aux plus pauvres. Toutefois, comme toujours la rĂ©alitĂ© est complexe et, comme souvent, contradictoire. Le processus de dĂ©structuration des anciens rapports de production et des organisations spatiales correspondantes est l'occasion pour les victimes d'une conscientisation accĂ©lĂ©rĂ©e ils sont devenus des travailleurs libres. MĂŞme si cette libertĂ© est chèrement payĂ©e, du moins ne subissent-ils plus le pesant contrĂ´le social qu'exerçait sur eux le propriĂ©taire foncier. Cela Ă©rode le lien social vertical qui anesthĂ©siait les mouvements sociaux. Cette dĂ©structuration Ă©tait sans doute nĂ©cessaire avant la non moins indispensable restructuration. Reste Ă examiner si cette structuration dynamique de la sociĂ©tĂ© et du territoire trouve aujourd'hui les conditions pour produire un ordre socio-spatial plus Ă©quitable. Conclusion IntĂ©grer dans la justice ? 44L'instauration d'un rĂ©gime dĂ©mocratique en 1985 est le fait majeur du BrĂ©sil contemporain. On pourra toujours souligner les limites du processus permanence du clientĂ©lisme Ă©lectoral, fragilitĂ© de la culture politique, compromis - certains diraient compromissions - auxquels obligent les alliances Ă©lectorales, difficultĂ© pour les plus pauvres d'exercer pleinement leurs droits de citoyens. Mais, par dĂ©finition, comment la transition dĂ©mocratique aurait-elle pu ne pas ĂŞtre une transition ? Comment pourrait-elle ne pas dĂ©pendre des inerties du passĂ© autant que des innovations du prĂ©sent ? Comment ne pas voir aussi que la dĂ©mocratie progresse au fil des annĂ©es, non seulement lors des Ă©chĂ©ances Ă©lectorales, mais aussi dans la gestion quotidienne des affaires publiques, dans la participation citoyenne, dans le refus de la corruption par l'opinion, bref dans la culture politique. 45Au-delĂ des mesures sociales dont l'utilitĂ© et l'urgence ne sont Ă©videmment pas en cause programme Faim ZĂ©ro, programme de la Bourse Famille, ce qui peut inquiĂ©ter, c'est plutĂ´t la difficultĂ© que rencontrent les forces politiques au pouvoir Ă faire Ă©merger un modèle social et Ă©conomique alternatif au modèle en vigueur antĂ©rieurement. Mais, une analyse qui se rĂ©clame de John Rawls doit l'affirmer clairement, restaurer la dĂ©mocratie est en soi faire Ĺ“uvre de justice. Au risque d'une tautologie, on peut dire en effet que, dans l'ordre politique, la justice a pour nom dĂ©mocratie, dans la mesure oĂą seul ce système reconnaĂ®t l'Ă©galitĂ© intrinsèque des personnes en tant que citoyens et satisfait au premier principe de la justice comme Ă©quitĂ©. Que l'exercice effectif de la citoyennetĂ© passe par les conditions matĂ©rielles d'accès aux biens matĂ©riels et Ă la culture est chose Ă©vidente, mais, au fond, n'est-ce pas aussi le propre de la dĂ©mocratie qu'elle ne dĂ©finisse pas a priori un modèle social et qu'elle invite les partenaires sociaux Ă en dĂ©battre ? 46Sur tous ces domaines qui relèvent de l'Ă©conomie, de la sociologie et des sciences politiques, la gĂ©ographie a plus Ă apprendre auprès des disciplines dont c'est le champ propre d'investigation qu'elle n'a Ă les renseigner. En revanche, le point sur lequel l'approche gĂ©ographique peut avancer sa contribution rĂ©side dans l'organisation du territoire et les pratiques socio-spatiales rapportĂ©es Ă la justice sociale et Ă la reproduction sociale. LĂ encore, plusieurs Ă©chelles s'articulent les unes avec les autres. L'Ă©chelle nationale pose la question de l'ouverture extĂ©rieure et de la recomposition territoriale qui s'en ensuit. Brasilia voit dans le Mercosul l'Ă©chelle macrorĂ©gionale adĂ©quate pour entrer dans la mondialisation en position de force et participer Ă©ventuellement Ă la future Alca - Association de libre commerce des AmĂ©riques - sans se soumettre au bon vouloir de Washington. Cette position implique de mettre Ă l'interne le territoire en cohĂ©rence avec les visĂ©es externes. Elle repose le problème que le rĂ©gime militaire avait rĂ©solu d'une façon critiquĂ©e ici mĂŞme faut-il privilĂ©gier les pĂ´les d'excellence pour tenir son rang Ă l'extĂ©rieur, au risque de marginaliser une partie du territoire et de crĂ©er une sociĂ©tĂ© Ă deux vitesses, ou est-ce dans le consensus social, la rĂ©duction des inĂ©galitĂ©s et la cohĂ©sion territoriale que doit ĂŞtre trouvĂ©e une productivitĂ© systĂ©mique appuyĂ©e sur des pĂ´les d'excellence et garante du succès international ? 19 L'interrogation prĂ©sente quelque analogie avec le dĂ©bat qui occupe les amĂ©nageurs français sur le ... 47Cette alternative met Ă l'Ă©preuve l'idĂ©e de l'efficacitĂ© de la justice pour le dĂ©veloppement faut-il consolider l'agglomĂ©ration de SĂŁo Paulo comme ville mondiale - la seule qui puisse prĂ©tendre Ă ce titre au BrĂ©sil - au risque de priver les autres mĂ©tropoles des fonctions supĂ©rieures qui leur font dĂ©faut, ou faut-il au contraire dĂ©localiser dans un souci de distribution Ă©quitable au risque d'affaiblir la capitale Ă©conomique dans la compĂ©tition qu'elle livre face Ă ses concurrentes Ă©trangères19 ? Il n'est pas prouvĂ©, toutefois, que la question soit bien posĂ©e si on la limite Ă la recherche d'un point d'Ă©quilibre entre ce qui serait trop et ce qui ne serait pas assez de concentration ou de dĂ©localisation. En effet, il ne s'agit pas d'un jeu Ă somme nulle qui enlèverait nĂ©cessairement Ă l'une, la pĂ©riphĂ©rie, ce que l'on donnerait Ă l'autre, le centre. Il faut rĂ©flĂ©chir au contraire Ă une structuration dynamique d'un territoire nĂ©cessairement diffĂ©renciĂ©, par laquelle le renforcement des points forts profite aussi aux points faibles et y amĂ©liore les conditions de vie. C'est penser l'amĂ©nagement du territoire en termes de principe de rĂ©paration et de maximin et c'est affirmer que la gĂ©ographie peut servir aussi Ă produire la justice. L'important est que l'allocation des dĂ©penses publiques au profit des plus pauvres, hommes et territoires, ne constitue pas une sorte d'aumĂ´ne consentie Ă une pĂ©riphĂ©rie dĂ©shĂ©ritĂ©e, mais un investissement Ă long terme qui permette Ă cette dernière de rĂ©agir aux impulsions du centre. 48La mise en Ĺ“uvre de ce principe requiert la diffusion sociale et spatiale du dĂ©veloppement. C'est ici que les Ă©chelles rĂ©gionales et locales reprennent leur place. En effet, si l'objectif est bien que les effets d'entraĂ®nement se diffusent dans l'ensemble du corps social et permettent que la mĂ©tropole principale joue son rĂ´le de pĂ´le de dĂ©veloppement pour le territoire dans son entier, il faut que l'environnement socio-Ă©conomique y offre les conditions favorables. La configuration territoriale Ă inventer n'est donc pas une simple pĂ©rĂ©quation de ressources dont le montant total serait inchangĂ©. Bien au contraire, ce doit ĂŞtre le moyen pour que le produit total augmente. 49La solidaritĂ© sociale et territoriale, disons socio-spatiale, est nĂ©cessaire d'abord parce qu'elle juste, mais aussi parce qu'elle est productive c'est l'efficacitĂ© de la justice. 5012 Il apparaĂ®t naturel de se prĂ©munir contre les intrusions indĂ©sirables et les codes installĂ©s aux portes des immeubles en France relèvent du mĂŞme souci. Une diffĂ©rence majeure au BrĂ©sil, les gardiens d'immeubles sont très souvent des gardes armĂ©s.'Le retournement de l'espace syrien'' : Fabrice Balanche, chercheur et spĂ©cialiste de la Syrie, dĂ©crypte la crise en cours.Dans un rapport 403 ERROR The Amazon CloudFront distribution is configured to block access from your country. We can't connect to the server for this app or website at this time. There might be too much traffic or a configuration error. Try again later, or contact the app or website owner. If you provide content to customers through CloudFront, you can find steps to troubleshoot and help prevent this error by reviewing the CloudFront documentation. Generated by cloudfront CloudFront Request ID d4QtpiCYgvGyht_jgG0LntsVUr63c95jbZEJZFlC-0g0djnNEpyglw== Lesruptures d’égalitĂ© et de fraternitĂ© : la cohĂ©sion nationale en question 15 Persistance des discriminationsRelents racistes et antisĂ©mites 15 Fractures sociales et socio-spatiales 18 L’École : facteur de promotion ou reproduction sociale ? 20 CohĂ©sion sociale et engagements solidaires : acteurs et leviers 23 De la fraternitĂ© Ă
28 juillet 2012 6 28 /07 /juillet /2012 2047 Pour Claude GuĂ©ant, le texte que prĂ©pare Manuel Valls sur les critères de la rĂ©gularisation des Ă©trangers en situation clandestine aura pour consĂ©quence de crĂ©er des droits pour des personnes qui ont violĂ© la loi». INTERVIEW - Pour l'ancien ministre de l'IntĂ©rieur Claude GuĂ©ant, la ligne politique du gouvernement se rĂ©sume Ă annuler ce qui a Ă©tĂ© fait sous Sarkozy. LE FIGARO. - Comment rĂ©agissez-vous aux dĂ©clarations de votre successeur au ministère de l'IntĂ©rieur, Manuel Valls? Claude GUÉANT. - La ligne de la politique mise en Ĺ“uvre par le gouvernement Ayrault semble se rĂ©sumer Ă annuler ce qui a Ă©tĂ© fait sous la prĂ©sidence de Nicolas Sarkozy, fĂ»t-ce au dĂ©triment des intĂ©rĂŞts fondamentaux de notre pays. Nous avons pu le constater, ces deux dernières semaines, en matière Ă©conomique les mesures adoptĂ©es dans le collectif budgĂ©taire n'ont pour rĂ©sultat que de diminuer les revenus des Français et de rĂ©Âduire la compĂ©titivitĂ© des entreprises, alors qu'au contraire il conviendrait de stimuler et la consommation et la productivitĂ© française. En ce qui concerne l'immigration, et singulièrement le volet naturalisation, les mesures que prĂ©conise Manuel Valls sont de naÂture Ă porter gravement atteinte Ă la cohĂ©sion sociale, alors mĂŞme que le gouvernement socialiste lui-mĂŞme ne cesse de proclamer sa volontĂ© de rassembler le pays. Dans quel Ă©tat d'esprit aviez-vous Ă©tabli en 2011 de nouveaux critères d'accès Ă la naturalisation pour les Ă©trangers? Notre politique avait un objet et un seul faire en sorte que les naturalisations soient des succès et que les nouveaux Français soient reconnus sans aucune rĂ©serve comme des Français Ă part entière qu'ils sont. Devenir français, ce n'est pas le dĂ©but d'un parcours, c'est l'aboutissement d'une intĂ©gration, comme d'ailleurs Manuel Valls le reconnaĂ®t. Nous avions Ă©tabli trois nouvelles conditions la première, en vigueur depuis le 1er janvier 2012, faire preuve d'un minimum de connaissance de la langue française. C'est le niveau correspondant Ă la fin de la scolaritĂ© obligatoire la troisième. C'est le critère retenu par l'ensemble des pays europĂ©ens et d'autres comme le Canada. La deuxième mesure, applicable depuis le 1er juillet, consistait Ă demander une connaissance minimale de notre histoire, de nos institutions, de notre culture, sous forme d'un QCM questionnaire Ă choix multiple. LĂ encore, cela me semble absolument normal et de bon sens qu'un Français connaisse les grands principes de la sociĂ©tĂ© dans laquelle il vit. Ce QCM a Ă©tĂ© testĂ© pendant plusieurs mois et il ne correspond en rien Ă la description qu'en fait Manuel Valls. Enfin, il y a une troiÂsième mesure, qui consistait Ă faire signer par les nouveaux Français une charte des droits et des devoirs» des citoyens, lors d'un entretien d'assimilation. La remise en cause de ces mesures est-elle le signal d'un assouplissement de la politique d'immigration? Je serais très choquĂ© que le gouvernement veuille revenir sur ces trois meÂsures qui n'ont pour objet que de garantir la cohĂ©sion de notre pays. Je crois malheureusement que c'est un signal parmi beaucoup d'autres. Au SĂ©nat, Manuel Valls a confirmĂ© qu'il allait revoir les critères de la rĂ©gularisation des Ă©trangers en situation clandestine. Le texte que prĂ©pare le ministre aura Ă l'Ă©vidence pour consĂ©quence de crĂ©er des droits pour des personnes qui ont violĂ© la loi. Ce qui pose problème. Il indique qu'un des critères pourrait ĂŞtre celui de la scolarisation des enfants. Or tous les enfants Ă©trangers, quelle que soit la rĂ©gularitĂ© du sĂ©jour de leurs parents, sont accueillis dans nos Ă©coles. Cela signifie qu'il suffirait d'avoir des enfants pour avoir un droit dĂ©finitif au sĂ©jour. Manuel Valls dit aussi que le fait de travailler clandestinement pourrait donner droit au sĂ©jour. Autant dire que plus on est irrĂ©gulier, plus on enfreint la loi, plus on aurait droit au sĂ©jour. Je laisse les Français juger! J'ajoute que la crĂ©ation du forfait de 30 euros pour l'accès Ă l'aide mĂ©dicale d'État AME avait pour objectif de mettre fin Ă une anomalie le plus pauvre des Français doit cotiser un minimum alors qu'un Ă©tranger clandestin pouvait ĂŞtre soignĂ© gratuitement. Le gouvernement remet en vigueur cette injustice. Quelle idĂ©ologie sous-tend ce changement de cap? Le trait commun de toutes ces mesures, on le trouve dans les publications de l'association Terra Nova, qui sert de laboratoire d'idĂ©es au PS. Ces publications disent que la classe ouvrière est devenue ringarde et conservatrice et qu'elle doit ĂŞtre, en tant que clientèle Ă©lectorale, abandonnĂ©e par la gauche. Avec un total cynisme, ces publications affirment que puisque les personnes issues de l'immigration votent Ă 75% pour la gauche, la nouvelle clientèle Ă©lectorale Ă cultiver pour le PS doit dĂ©sormais ĂŞtre celle des personnes issues de l'immigration. Par consĂ©quent, il faut augmenter l'immigration! La droite n'est pas contre l'immigration, mais elle veut maĂ®triser les flux migratoires afin que ceux qui sont lĂ©galement accueillis dans notre pays s'y sentent Ă l'aise et y rĂ©ussissent. En revanche, favoriser une immigration incontrĂ´lĂ©e pour des motifs politiciens prĂ©sente de grands dangers pour la cohĂ©sion sociale et pour la prĂ©servation des valeurs de la RĂ©puÂblique. Published by Franck GUIOT
Lepari consiste à répartir de manière équitable les fruits de la croissance pour renforcer la cohésion sociale. Cela implique des efforts pour que les richesses soient également distribuées entre les territoires et les catégories sociales. De même, il convient de sauvegarder la compétitivité de l’économie nationale, afin que les
Quelle société voulons-nous ? Les inégalités sont elle toujours injustes ? Les inégalités sont-elles compatibles avec la justice sociale? Dans ce thème nous allons répondre à ces questions en analysant notamment le concept de justice sociale et en repérant les actions de l’État pour réduire les inégalités sociales. Les notions du programme à connaître inégalité économique et sociale, rapport inter-quantiles, courbe de Lorenz, coefficient de Gini, top 1%, égalité de droit ou de chance ou de situation, utilitarisme, libertarisme, égalitarisme, assurance et assistance, services collectifs, fiscalité, prestations et cotisations sociales, redistribution, protections sociale, discrimination, I. Des inégalités multiples A Des différences sociales à l’origine des inégalités sociales Toutes les différences sont-elles des inégalités? La réponse est non. Une inégalité c’est une différence qui procure un avantages pour certains, un désavantages pour d’autres et qui est à l’origine des hiérarchies. De plus , comme le précis Patrice Bonnewitz dans Classes sociales et inégalités, l’inégalité individuelle ne devient une inégalité sociale que si l’infériorité ou supériorité est partagée par des personnes aux caractéristiques sociales identiques » Les inégalités sont à la fois objectives, on peut les observer, mais aussi subjectives autrement dit, elles sont ressenties différemment suivant les individus et la société dans laquelle on vit. Exemple les mouvements féministes ont révélé des inégalités Hommes-Femmes qui étaient jusqu’à il y a peu de temps aux yeux de l’histoire, assimilées à des inégalités naturelles Remarque ne pas confondre inégalité et injustice. En effet, l’inégalité est un fait social alors que la question de juste ou injuste est une norme. Certaines inégalités peuvent être juste, d’autres injustes. Comment peut-on alors décrypter les inégalités? B. Des inégalités économiques Les inégalités économiques sont des différences dans la distribution des ressources économiques. On peut distinguer les inégalités de revenus flux et les inégalités de patrimoine stock Quels revenus doit-on prendre en compte pour repérer les inégalités? Les salaires bruts? >Les salaires nets? Les revenus primaires ? Les revenus disponibles bruts? Souvent on compare le salaire net. Cela concerne en effet, une grande partie des actifs occupés et cela prend en compte une partie de la redistribution opérée via les cotisations sociales. Les données sont plus faciles à obtenir mais cependant cela ne prend pas en compte les impôts directs et les revenus du patrimoine. La mesure des inégalités économiques peut alors se faire de 2 façons, pour le dire simplement. Soit on calcule les écarts à la moyenne par exemple la comparaison entre le salaire moyen des Hommes et des Femmes. Soit on repère les dispersions des revenus dans la population via les quantiles. En économie on utilise souvent les quartiles ou les déciles. Depuis quelques temps, . avec la montée des privilèges de la minorité la plus riche on utilise de plus en plus le centile pour caractériser le 1% des plus riches. Si tu veux en savoir plus avec l’Observatoire des inégalités, c’est ICI. Ces outils statistiques doivent être bien intégrés et j’ai donc mis en place dans MÉTHODES des exercices pour que tu maîtrises bien les notions de quantiles mais aussi la courbe de Lorenz et le coefficient de Gini. Les revenus sont des flux et les inégalités continuelles de revenus viennent grossir le stock de patrimoine, ce qui concentre encore plus les inégalités. On constate ainsi que plus les revenus sont élevés et plus les patrimoines sont globalement importants. D’autre part l’analyse des données en France et dans l’ensemble des pays, permet de constater que les inégalités patrimoniales sont plus prononcées que les inégalités de revenus A travers son ouvrage Le capital au XXIe siècle, le célèbre économiste français Thomas Piketty a réalisé un travail remarquable concernant les inégalités. Il reprend notamment l’idée que les inégalités se cumulent de générations en générations et qui cela creuse in fine les inégalités selon l’origine ou l’appartenance sociale. Nous retrouvons son analyse ci-dessous Mais les inégalités ne sont pas que économiques… C. Des inégalités sociales Les inégalités sociales sont des différences dans la distribution des ressources sociales . Au sens large, les ressources sociales comprennent donc les ressources monétaires mais aussi culturelles, les ressources en terme de capital social. Il existe ainsi de nombreuses inégalités concerne par exemple l’accès à un logement décent. Ce sont également les inégalités dans la représentation politiques. Par exemple les députés ouvriers sont sous-représentés voire invisibles alors que les députés cadres sont su-représentés. Cela peut aussi concerner les inégalités devant la mort. Par exemple, l’espérance de vie moyen d’un homme cadre est de 6 ans plus élevé que celui d’un homme ouvrier selon l’INSEE, d’après les conditions observées en 2010 Nous pouvons repérer les inégalités selon les variables statistiques traditionnelles. Parmi les » variables lourdes » on retrouve le genre , l’âge, la catégorie sociale d’appartenance ou de provenance, le diplôme. Je te laisse faire les analyses de différents tableaux statistiques. Tu peux en retrouver notamment dans l’Observatoire des inégalités. Les inégalités se cumulent c’est à dire que certaines inégalités sont à l’origine d’autres inégalités . Ainsi les inégalités de revenu renforcent les inégalités de logement qui peuvent expliquer d’autres formes d’inégalités et notamment les inégalités scolaires. Il est moins facile de se concentrer par exemple lorsqu’on est 2 ou parfois plus par chambre et lorsqu’on a la chance d’avoir SA chambre. Par conséquent, les inégalités scolaires vont engendre des inégalités dans les qualifications et donc dans les futurs emplois. Ainsi la boucle se referme avec de nouvelles inégalités de revenus II. L’évolution des inégalités économiques depuis le début du XXe siècle A la veille de la première guerre mondiale la situations était très clivée. D’un côté des bourgeois, profitant allègrement du progrès techniques pour s’enrichir, de l’autre des prolétaires exploités comme l’analyse et le décrit Karl Marx dans Le Capital. Mais comme nous le décrit Thomas Piketty dans Le capital au XXe siècle, la première guerre mondiale va redistribuer les cartes puisque l’effort de guerre va être à l’origine de l’impôt sur le revenu. Par la suite, la crise de 1929 va détruire certains patrimoines accumulés et la seconde guerre mondiale va également redistribuer les au cours de la deuxième moitié du XXe siècle, l’époque des trente glorieuses est propice aux idées keynésiennes, si bien que dans de nombreux pays développés l’État va intervenir dans l’économie en redistribuant les revenus via les impôts. Cette diminution des inégalités qui fait suite à l’augmentation constatée en début de développement est souvent schématisée par la courbe de Kuznets, du nom de l’économiste . Mais depuis les années 1980, une reprise des inégalités s’observent d’abord dans les pays anglo-saxons mais également dans les pays comme la France où les protections sociales limitent pourtant la polarisation des revenus. L’économiste Branko Milanovic a symbolisé cet état de fait par ce qu’il appelle la courbe de l’éléphant. Ce mouvement de reprise des inégalités est à rapprocher des idées libérales qui refont surface à la fin des années soixante-dix, avec notamment l’arrivée de Margaret Thatcher aux Royaume-Unis et de Ronald Reagan aux États-Unis. L’Europe va emboîter le pas, au nom de la liberté d’entreprendre et de la compétitivité. Mais est-ce un mal ? Quelle forme de société désirons-nous ? Il est alors temps d’avoir un regard sur les différentes conceptions de la justice sociale III. Les différentes formes d’égalité et la justice sociale A. La notion d’égalité Légalité peut être définie comme un principe qui établit une équivalence entre deux individus ou deux groupes. Mais quel type d’équivalence précisément ? Selon le philosophe A. de Tocqueville 1805/1859 il existe trois types d’égalité. . L’égalité de droit ou de condition. Tous les individus sont égaux devant la loi. C’est la caractéristique de la modernité, qui marque le passage de l’ancienne société d’ordre à une société démocratique’ c’est à dire selon Tocqueville, une société sans différences dans les statuts juridiques . L’égalité de chances. Tous les individus peuvent accéder aux positions sociales que lui permettent ses capacités et mérites. Cela rejoint la notion de méritocratie . L’égalité de fait, ou de situation Les individus disposent davantage économiques et sociaux identiques. Il s’agit ici de mesurer les différents écarts d’égalité ou inégalité entre les individus dans tous les domaines niveau de vie, revenu, logement, loisirs, accès à la culture, … Le saviez-vous? Alexis de Tocqueville Alexis-Henri-Charles Clérel, comte de Tocqueville. Avouez qu’avec un nom, on ne peut cacher ses origines nobiliaires! Ses parents étaient à deux doigts de passer sous la guillotine en 1794 pendant la Révolution. Puis son père maire de Verneuil sur Seine est très lié au parti ultra-royaliste, refusant toute innovation démocratique. Par qui le jeune Alexis a-t-il été alors influencé pour défendre la démocratie ? Comment lui est venu l’idée d’écrire De la démocratie en Amérique après son voyage outre-atlantique en 1831 ? Alexis influencé par ses professeurs et notamment l’historien Guizot, devient libéral. Il pense alors que la liberté est indissociable de l’égalité pour construire un système démocratique. Longtemps oublié, ses écrits seront mis sur le devant de la scène grâce au philosophe Raymond Aron, qui s’en sert comme par feu libéral contre les idées communistes de Sartre. Mais je te laisse compléter cela grâce à tes cours de philosophie. Ainsi on peut avoir égalité de droit sans égalité de chance et de situation ou égalité de droit et de chance sans égalité de situation Assurer plus d’égalité, cela signifie-t-il plus de justice? B. Qu’est-ce qu’une société juste ? La justice sociale, c’est l’ensemble des principes qui définissent la répartition équitable des droits sociaux et des devoirs au sein d’une collectivité. Ce qui est juste ou injuste se base sur un jugement de valeur. C’est donc un point de vue normatif car on tente de définir ce qui est souhaitable. Chacun d’entre nous à son propre jugement de ce qu’il considère comme une société juste ou injuste. Mais globalement, on peut distinguer quatre visions différentes de la justice sociale -> Une vision utilitariste. C’est une vision qui découle des idées développées par les anglais J. Bentham ou Mill entre autres et qui a donné naissance à ce qu’on appelle aujourd’hui l’économie du bien-être. Selon, J. Bentham, économiste anglais fin XVIIIe, l’État doit rechercher le plus grand bonheur du plus grand nombre’ donc on doit rechercher la meilleure allocation des ressources ce qui permet d’atteindre l’optimum social. Mais cette vision ne précise pas vraiment quelle serait la meilleure répartition des ressources entre les individus. Selon les utilitaristes la société idéale doit maximiser la satisfaction des individus. L’objectif est donc de maximiser la satisfaction. On dit aussi en économie utilité collective ». Autrement dit, on se doit de réduire les inégalités uniquement lorsque cela maximise la satisfaction globale. -> Une vision libérale De nombreux libéraux, notamment R. Nozick, philosophe américain, tête pensante du courant libertarien, ou encore le philosophe et économiste britannique d’origine autrichienne F. Hayek, mettent en avant la liberté qui permet d’entreprendre, de créer et qui apporte la richesse. Il ne faut pas donc pas freiner cette ardeur en recherchant l’égalité. En effet, les différences agissent comme des aiguillons qui incitent les individus à se surpasser. Inversement, l’égalité conduit à l’inefficacité car si on garantit à tous une même condition sociale alors il y a moins d’efforts fournis. D’autre part, la recherche de toujours plus d’égalité conduit à l’uniformité, à la volonté de réduire toutes les différences. L’ État peut agir ainsi en régime plus ou moins autoritaire qui établit les normes d’égalité entre les citoyens. C’est la thèse développée par F. Hayek dans son livre la route de la servitude’ écrit en 1944. F. Hayek écrit son livre dans un contexte particulier marqué par l’existence de régime totalitaire le nazisme mais aussi le communisme d’État en URSS. Le saviez-vous? Friedrich Hayek 1899/1992 est une référence en tant que penseur intellectuel du libéralisme. Il est né en Autriche, étudie le droit et les sciences politiques et s’intéresse aussi à l’économie. C’est dans ce cadre qu’il va être influencé par l’École Néoclassique autrichienne. Dans les années trente il devient professeur à la prestigieuse London School of Economics, qui aujourd’hui a encore pignon sur rue, dans le centre de Londres, pas très loin du non moins célèbre King’s college. L’ouvrage majeur de Hayek est publié en 1944. La route de la servitude est un ouvrage remarquablement bien écrit et qui s’efforce de montrer les effets négatifs de toute politique économique trop dirigiste qui contraint l’individu. Hayek démonte ainsi les fondements collectivistes des régimes totalitaires, fasciste et communiste mais montre aussi les effets pervers de toute politique trop dirigiste comme par exemple les politiques keynésiennes. En 1947, il est à l’initiative de la célèbre société du Mont Pèlerin, qui réunit toujours chaque année des membres libéraux. C’est une société puissante, soutenue par de grandes entreprises et qui est à l’origine de nombreux think-tank libéraux comme par exemple l’Institut Turgot ou encore la Fondation Atlas. Tous ces think-tank influencent fortement les politiques économiques visant à réduire l’action de l’État, et à promouvoir le jeu du marché libre. De plus, l »égalité nécessite des contraintes et cela peut remettre en cause la liberté d’entreprendre. Finalement les idées développées ci-dessus tentent à montrer qu’il faut laisser l’individu entreprendre, pour qu’il puisse mériter méritocratie un bon revenu, une bonne situation, du prestige social, … -> Une vision égalitariste A contrario, les égalitaristes ou ceux que l’on regroupe parfois sous l’appellation de communautariens, mettent en avant la valeur égalité’. Ils pensent que les inégalités sont un frein au progrès économique et social. Au delà de l’égalité formelle, il faut donc œuvrer en faveur d’une égalité réelle en reprenant notamment le principe de K. Marx de chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins ». Depuis Aristote, on présuppose que la justice est reliée à l’égalité. Ce philosophe grec, distinguait trois formes de justice. La justice commutative repose sur l’égalité arithmétique notamment dans l’échange marchand. La justice distributive est une égalité proportionnelle. Ainsi, un individu qui travaille à temps complet doit obtenir un salaire deux fois plus élevé qu’un travailleur à mi-temps. Il distingue enfin, la justice corrective, qui suppose une décision pour réparer une décision injuste. Les auteurs qui s’inscrivent dans le courant égalitariste s’opposent aux arguments des libertariens de la manière suivante . Égalité = uniformité? Au contraire. Lorsque les revenus sont distribués de manière plus égalitaire, chacun atteint un certain niveau de vie. Il y a alors plus de possibilités de s’épanouir, d’adapter un mode de vie spécifique, d’être différent. Une des fonctions essentielles de l’État providence est donc la redistribution des revenus, en proposant des revenus de transfert. ou prestations sociales . Égalité = inefficacité? Au contraire. les inégalités stérilisent la volonté de créer, d’innover. . Égalité = aliénation de la liberté? Au contraire. Ce sont les inégalités qui oppriment. La liberté des uns permet l’ exploitation des autres. Lorsque les conditions sociales des citoyens sont globalement plus favorables alors il y a possibilité de s’exprimer, de se libérer d’un carcan social, de ne pas être exploité Les dépenses sociales permettent de libérer l’homme du besoin et du risque’ selon l’économiste anglais William Beveridge 1879/1963 -> La justice sociale selon Rawls John Rawls 1921/ 2002 est une philosophe américain auteur de Théorie de la justice parue en 1971. Il s’inscrit dans une perspective libérale dans la mesure où la liberté est une priorité. Mais dans le même temps, il met en avant le principe d’égalité. Il caractérise alors les deux principes de la justice sociale . Le principe de liberté chaque personne doit avoir un droit égal au système le plus étendu de libertés de bases égales pour tous, qui soit compatible avec le même système pour les autres. . Le principe de différence les inégalités sociales et économiques ne sont justifiées que si elles sont au plus grand bénéfice des plus désavantagés et si elles sont attachées à des fonctions et à des positions ouvertes à tous. C’est le principe du Maximin. Cette abréviation de maximum minimorum signifie que les politiques économiques doivent agir pour rendre la situation des moins favorisés la plus favorable. Cette vision de la justice se réfère donc à la notion d’équité, qui est un jugement que l’on porte sur une situation. Ainsi on donne plus à ceux qui ont le moins. Par exemple, pour être plus juste les dyslexiques bénéficient d’un tiers temps pour le baccalauréat. On remet ici en cause le principe d’égalité de traitement de tous les candidats, dans le but de corriger les inégalités. Une application concrète la discrimination positive, dont nous parlerons plus loin. IV. Comment l’État peut-il contribuer à la justice sociale? La volonté de faire intervenir l’État pour contribuer à la justice sociale est fortement dépendante de la vision de la justice sociale que l’on considère. On peut dire, qu’il existe un consensus, sauf exception, sur l’idée que l’ État doit veiller au respect de l’égalité de droit mais aussi de l’égalité des chances. Finalement, les divergences d’opinion, entre libéraux, sociaux-démocrates ou égalitaristes, … reposent sur l’échelle des inégalités de situation qui parait acceptable. On peut considérer que les pouvoirs publics disposent de plusieurs outils pour permettre une certaine forme de justice sociale la redistribution, les services collectifs et les politiques volontaristes de lutte contre les discriminations. Nous sommes ici face aux objectifs de l’État providence. Il doit intervenir dans la recherche du progrès économique et social. C’est une vision de l’État qui s’est imposée après la seconde guerre mondiale et qui s’oppose à l’État gendarme du XIXe qui n’assure que les fonctions régaliennes police et justice, armée et monnaie A. La redistribution La redistribution définit l’ensemble des opérations visant à modifier la répartition primaire des revenus. La redistribution répond à un objectif de solidarité entre les individus ou entre les générations redistribution horizontale et à un objectif de réduction des inégalités redistribution verticale. Tu dois notamment bien maîtriser les notions de Prélèvement obligatoire = impôts + cotisations sociales Impôt prélèvement obligatoire de l’autorité publique sans contrepartie Cotisations sociales ensemble des versements effectués par le travailleur et l’employeur au bénéfice des organismes de protection sociale. La protection sociale vise à couvrir les risques sociaux c’est à dire les risques qui peuvent compromettre les revenus économiques d’un individu et éventuellement de sa famille. On distingue alors trois logiques de protection sociale. que nous allons développer ci-dessous. Il existe une logique universelle c’est à dire que tout le monde y a droit comme par exemple les prestations familiales, une logique assurantielle qui dépend des cotisations versées et une logique d’assistance qui concerne notamment les minima sociaux. Parmi les organismes principaux qui gèrent la protection sociale, on retrouve la Sécurité Sociale qui gère les risques de maladie, le risque vieillesse, familial, et aussi les accidents du travail et les maladies professionnelles. L’Unedic et Pole Emploi sont les organismes qui gèrent l’assurance chômage. On doit aussi prendre en compte les collectivités locales puisque les minima sociaux sont en grande partie distribuée par les départements, mais aussi les organismes d’Habitations à Loyer Modéré HLM permettant à des millions de personnes en France d’occuper un logement sans dépendre des prix du marché immobilier. Prestations sociales sont des revenus de transfert versés par les institutions en charge de la protections sociale. Enfin, tu dois te souvenir de la notion de première Revenu Disponible Brut RDB = revenu primaire – impôts directs et cotisations sociales + revenu de transfert mais aussi Revenu Disponible Brut ajusté = RDB + transferts sociaux en nature notamment les remboursements de soins de santé La fiscalité c’est l’ensemble des règles relatives au recouvrement des impôts et taxes. C’est un des outils dont peut disposer les pouvoirs publics pour tendre à une certaine forme de justice sociale. D’une part parce que les recettes fiscales financent les services publiques dont profitent l’ensemble des citoyens et d’autre part parce que les règles fiscales permettent une redistribution des ressources. Ainsi ceux qui sont en faveur d’une égalité forte entre les citoyens vont favoriser les impôts progressifs comme l’impôt sur le revenu on dit plus précisément l’Impôt sur le Revenu des Personnes Physiques IRPP. Ceux qui ne souhaitent pas modifier la répartition des revenus vont prôner les impôts proportionnels. Par exemple la CSG est un impôt proportionnel qui taxe tous les revenus. Mais il existe une autre forme d’imposition injuste, c’est l’impôt dégressif, autrement dit on prélève une proportion plus importante de leurs revenus aux personnes moins favorisées qu’aux personnes plus favorisées. Plus tu gagnes, moins tu paies! Incroyable non ? C’est l’exemple des timbres fiscaux ou de la redevance pour la télévision. Cela peut aussi être la Taxe sur la Valeur Ajoutée qui est un impôt proportionnel sur la consommation mais qui peut être considéré comme un impôt dégressif en terme relatif. En effet, prélever 20% de la consommation d’un smicard, cela réduit plus fortement son pouvoir d’achat que lorsqu’on prélève 20% de la consommation d’une personne favorisée. On peut ainsi considérer que la TVA est un impôt injuste. La France a une caractéristique majeure en terme fiscal; un peu plus de la moitié des recettes fiscales proviennent de la TVA! Le saviez-vous? La Taxe sur la Valeur Ajoutée TVA a été inventée en France. C’est M. Lauré, haut fonctionnaire français spécialiste de la fiscalité, qui l’a mise en place en 1954. La TVA va véritablement s’appliquer à l’essentiel de la consommation des individus à partir de 1967. Par extension, cette taxe fut reprise dans les années soixante par les pays européens. Dès 1977 l’ Europe tente d’harmoniser les différentes TVA de chaque pays. Cette taxe est terriblement efficace pour augmenter les recettes de l’ Etat. C’est ce qui explique sa généralisation progressive dans le monde. Elle nécessite toutefois un Etat suffisamment développé pour administrer les flux d’argent. Intéressons nous maintenant à la redistribution. Nous allons nous attarder sur les deux formes de redistribution qui correspondent historiquement à deux parcours distincts. Tout d’abord, arrêtons nous sur la redistribution horizontale et reprenons le système d’assurance sociale hérité de l’époque de Bismarck et qui inspira en grande partie le système de protection sociale français. On parle parfois de régime corporatiste. Les pouvoirs publics fournissent une assurance sociale en contrepartie du travail fourni par extension à toutes les personnes dépendante du travailleur. Ce système contribution/rétribution ouvre aux citoyens des droits envers la société. C’est ce qu’on appelle le droit objectif ». Les prestations dont peut bénéficier le citoyen sont liées à une contribution. Il s’agit notamment des pensions civiles ou retraites, des allocations chômage, des indemnités maladie Maintenant, nous allons voir l’autre versant de la redistribution, la redistribution verticale dans une logique d’assistance aide versée aux individus dans le but de leur fournir une protections sociale minimale. On dit qu’il s’agit d’un système beveridgien car l’anglais William Beveridge en est le fondateur en 1942. Par exemple ceux qui n’ont pas la possibilité de satisfaire leurs besoins peuvent bénéficier en France du Revenu de Solidarité Active socle. Cela correspond à 537 € 2017. C’est une donnée brute. Tu dois savoir qu’un débat se fait jour dans beaucoup de pays développés sur la question de mettre en place un Revenu Universel, c’est à dire un revenu assuré à tous les majeurs, actif ou non actif. Il existe en France d’autres revenus d’assistance parmi les minima sociaux. On peut ainsi nommer les Allocation de Solidarité Spécifique pour les chômeurs de très longue durée ou le minimum vieillesse ou Allocation de Solidarité aux Personnes Âgées pour les personnes âgées de plus de 65 ans qui ne perçoivent pas de revenu décent. On leur attribue 803 € par mois en 2017 Les minima sociaux sont des prestations non contributives, soumises à des conditions de ressources et de besoins, autrement dit l’argent est versée même si l’ayant droit n’a jamais contribué par des prélèvements sociaux. Il s’agit donc ici de droit subjectif. Remarque face aux difficultés de faire supporter une grande partie de la protection sociale sur les travailleurs, le système évolue depuis ces dernières années en France, avec une part plus conséquente de l’impôt pour financer la protections sociale. Si on veut rentrer dans le détail, mais c’est nécessaire car certains correcteurs sont tatillons comme tu le sais, la Contribution Sociale Généralisée CSG ou encore la Contribution pour le Remboursement de la Dette Sociale CRDS qui correspondent à un % prélevé sur tous les revenus, peuvent être considérées comme des impôts car il n’y a pas de contrepartie mais on peut aussi les considérer comme des cotisations car le montant est au bénéfice des organismes de protection sociale. Les deux réponses sont bonnes à partir du moment où tu le justifies. Un autre moyen pour l’État de permettre la justice sociale investir dans les services collectifs B. L’État investit dans les services collectifs Services collectifs ou services publics c’est à dire des activités d’intérêt général qui permettent la cohésion sociale. C’est une définition large qui laisse une grande marge d’interprétation sur la notion intérêt général’. Ainsi il est entendu que l’État réponde aux fonctions régaliennes justice, police, défense, monnaie. De plus l’État doit répondre au market failure’, c’est à dire les défaillances de marché et notamment prendre en charge les biens collectifs biens qui obéissent à deux principes, non rivalité et non excluabilité. Tu te rappelles? C’est des notions que tu as approfondi en première et qui sont nécessaires pour le bac! Petit rappel Il y a non excluabilité lorsqu’on ne peut exclure un consommateur. Par exemple pour un feu d’artifice, mais aussi pour profiter de la nature, du soleil, … Il y a non rivalité lorsque les consommateurs ne sont pas rivaux. La consommation par l’un n’empêche pas l’autre de consommer. Hors les biens collectifs, non excluables et non rivaux ne peuvent pas être privés puisqu’il y aurait des passagers clandestins. Il est donc nécessaire que l’État intervienne pour gérer ces biens. Enfin dans de nombreux pays développés, l’État prend en charge d’une façon plus ou moins importante des biens tutélaires, c’est à dire des biens en réalité des services qui pourrait répondre à un marché privé mais qui répondent cependant à une production publique. Cela relève d’une décision politique. On retrouve notamment la santé et l’ éducation qui permettent l’égalité des chances. Pour autant malgré les efforts de l’ État, les résultats ne sont pas toujours à la hauteur des espérances. Alors les pouvoirs publics utilisent un troisième outil permettant d’assurer une meilleure justice sociale C. Des mesures de lutte volontaristes de lutte contre les discriminations La discrimination au sens large est une différenciation de traitement qui conduit à mettre en cause le principe d’égalité. L’État peut ainsi être amené à lutter contre toute forme de discrimination en sanctionnant lourdement et en punissant ceux qui pratiquent la discrimination. D’autre part, l’État peut imposer des mesures pour réduire les discriminations. Par exemple, en imposant l’accessibilité des handicapés aux locaux administratifs. L’État peut aussi mettre en place des mesures de discrimination positive, c’est à dire une discrimination justifiée par une politique volontariste visant à réduire les inégalités. Il existe de nombreux exemples de politique de discrimination positive. Aux États-Unis, on parle d’Affirmative action pour combattre les inégalités subies par les minorités ethniques. L’administration se doit par exemple d’employer un certain nombre de personnes de couleurs. En Inde, pour combattre les préjugés contre les Intouchables, le pays a mis en place des quotas d’embauches d’Intouchables et dans les universités des places leurs sont réservées. Cela est d’ailleurs dénoncé par les enfants des autres castes’. En France, le meilleur exemple de discrimination positive est la parité homme-femme en vigueur en politique depuis la loi n° 2000-493 promulguée le 6 juin 2000 voir complément en Sciences Sociales et Politiques Thème 2 III C V. L’action de l’État est-elle toujours efficace? Nous allons tout d’abord rappeler quelques faits encourageants avant de reprendre les arguments notamment des libéraux qui insistent sur les effets pervers. A. Une réduction des inégalités La France fait partie des pays développés ou les inégalités économiques s’observent moins qu’ailleurs et notamment dans les pays anglo-saxons. Plus précisément, selon l’INSEE, les prestations sociales contribuent pour deux tiers à la réduction des inégalités. Cela montre l’importance des aides sociales accordées par la Sécurité Sociale et plus largement par la Protection sociale mise en place par les pouvoirs publics. Faut-il alors, mettre en place des politiques plus volontaristes? En réalité la conjoncture actuelle ne permet plus de mobiliser des dépenses publiques importantes. De plus, la société est traversée par des débats qui minent les actions. B. Une contrainte financière qui pèse sur l’action publique Le poids des déficits publics et dettes publiques nécessitent de réduire les dépenses publiques. Ainsi, dans les pays de la zone euro, les pays doivent se rapprocher, lorsqu’il n’existe pas de crise profonde, des deux règles fixées au traité de Maastricht. Le déficit public ne doit pas excéder 3% du PIB et le montant de la dette publique ne doit pas être supérieur à 60% du PIB. Ces contraintes financières, peuvent alors peser sur les dépenses sociales souhaitées par un gouvernement mais qui viendrait alourdir les dépenses de l’Etat et ainsi l’éventuel déficit public. In fine, cette contrainte financière risque d’affecter les plus démunis. C. Des remises en cause de l’efficacité de l’action de l’État Les économistes et les hommes politiques libéraux insistent sur les effets pervers et les désincitation liées à l’action de l’État. En effet les libéraux s’appuient notamment sur la célèbre courbe de Laffer du nom de l’économiste libéral américain. Cette courbe permet alors de critiquer un poids excessif des prélèvements sociaux qui pèse négativement sur la croissance économique. Lorsque le % des prélèvements sociaux dépasse un certain seuil, les recettes de l’État ne sont pas pour autant plus élevées, car il y a moins de travail . En effet si il est trop taxé, il y a des volontés d’échapper à l’impôt . On retrouve alors le travail non déclaré voire l’évasion fiscale. Les libéraux dénoncent aussi les effets pervers de l’assistanat. Ainsi il existe une trappe à la pauvreté une population est cantonnée dans l’inactivité et donc dans la pauvreté car il n’y a pas d’incitation à travailler. A contrario, certains citoyens attachés à plus d’égalité sont critiques pour d’autres raisons que nous allons voir ci-dessous D. Une recherche de l’égalité qui n’est pas toujours efficace? Lorsque l’État intervient par des financement de services collectifs, il recherche l’égalité entre tous, mais ceux qui en bénéficient le plus, sont souvent les familles plus favorisées. C’est notamment le cas vis-à -vis de l’ éducation qui bénéficie plus aux familles de classes moyennes et favorisées dont les enfants statistiquement continuent les études plus longtemps. Même le système de santé bénéficie aux plus favorisés car l’espérance de vie est plus longue parmi ceux qui sont dans les classes sociales plus favorisées. Conclusion les pouvoirs publics ont à leur disposition au moins trois outils pour assurer plus de justice sociale. La redistribution, les services collectifs et les politiques de discrimination positive. Il faut rester vigilant pour s’assurer que le filet de protection sociale ne se perce pas et que d’autre part les politiques sociales restent efficaces. Si tu as aimé cet article, tu peux mettre un commentaire ci-dessous. Si tu veux recevoir un article insolite de SES environ tous les mois, gratuit bien sûr, alors abonne-toi à notre newsletter sur alloprofses. Enfin si tu recherches un tuteur en SES, pour améliorer tes résultats, prends contact avec moi. MAJ juillet 2021 Philippe HerryDansl'édition 2020 du "Portrait social" de la France, l'INSEE dresse un premier bilan de la crise sanitaire du Covid-19 et du confinement. Les inégalités sociales se creusent. L'INSEE souligne par ailleurs un fort risque de J’apporte mon soutien Etat des lieux de la protection sociale dans le monde La protection sociale dans le monde en chiffres 55% de la population mondiale ne bénéficie pas d’une protection sociale en 2017 10 millions de professionnels de la santé sont nécessaires pour atteindre la couverture sanitaire universelle. 83 millions de mères n’ont pas accès à des prestations de maternité des personnes lourdement handicapées bénéficient d’une couverture sociale dans le monde 48% de la population mondiale vit dans un pays qui n’offre pas de prise en charge pour les soins de longue durée 800 millions de personnes dépensent au moins 10% de leur budget pour payer les soins de santé. 12,8% de jeunes sont au chômage. 152 millions de travailleurs sans emploi sont laissés sans protection contre le chômage. Evolution de la couverture mondiale en protection sociale à travers l'histoire En route pour un monde plus durable et juste En septembre 2015, les 193 Etats membres de l’ONU ont adopté le programme de développement durable pour 2030, intitulé Agenda 2030. C’est un agenda pour les populations, pour la planète, pour la prospérité, pour la paix. Il vise à transformer le monde en éradiquant la pauvreté et en assurant la transition vers un développement durable. 17 objectifs ont été fixés pour l’horizon 2030. La protection sociale est présente, directement ou indirectement pour au moins 5 d’entre eux. Elle est donc un élément incontournable pour parvenir à un monde plus durable et plus juste. 1 - Pas de pauvreté Objectif Mettre en place des systèmes et mesures de protection sociale pour tous, adaptés au contexte national, y compris des socles de protection sociale, et faire en sorte que, d’ici à 2030, une part importante des pauvres et des personnes vulnérables en bénéficient. 3 - Bonne santé et bien-être Objectif Faire en sorte que chacun bénéficie d’une couverture sanitaire universelle, comprenant une protection contre les risques financiers et donnant accès à des services de santé essentiels de qualité et à des médicaments et vaccins essentiels sûrs, efficaces, de qualité et d’un coût abordable. 5 - Egalité des sexes Objectif Faire une place aux soins et travaux domestiques non rémunérés et les valoriser, par l’apport des services publics, d’infrastructures et de politiques de protection sociale et la promotion du partage des responsabilités dans le ménage et la famille, en fonction du contexte national. 8 - Travail décent et croissance économique Objectif D’ici à 2030, parvenir au plein emploi productif et garantir à toutes les femmes et à tous les hommes, y compris les jeunes et les personnes handicapées, un travail décent et un salaire égal pour un travail de valeur égale 10 - Inégalités réduites Objectif Adopter des politiques, notamment sur les plans budgétaires, salarial et dans le domaine de la protection sociale, et parvenir progressivement à une plus grande égalité. Mieux comprendre les différents enjeux en matière de protection sociale universelle Avec la protection sociale, nous pouvons bâtir un monde meilleur Voix de jeunes sur la justice sociale La Couverture santé universelle CSU qu’est-ce que c’est ? La protection sociale une nécessité tout au long de la vie Comprendre les objectifs de développement durable L'égalité des chances, une question de justice et de bon sens
Notrepays reste marqué par de fortes inégalités sociales et territoriales de santé. Malgré un bon niveau de santé, on constate des écarts selon les territoires et les catégories socioprofessionnelles en termes de risques pour certaines pathologies ou d’espérance de vie en bonne santé. Les inégalités concernent l’exposition aux risques, mais aussi l’accès à l’offre de
Écrivain engagé sur la question des inégalités aux États-Unis, Joseph Stiglitz, né en 1943, fait partie de la mouvance des néo-keynésiens. Ces derniers s'opposent aux néolibéraux sur de nombreux points lutte contre l'inflation, déréglementation des marchés, politiques d'austérité, etc. Ils proposent en lieu et place de ces mesures peu concluantes une relance de l'économie par la demande, une meilleure répartition de la valeur ajoutée et surtout une intervention de l’État pour éviter les excès des institutions financières. Cela ne va pas sans une lutte contre les inégalités, qui font que 1 % des Américains se partagent plus de 40 % des richesses nationales constat aussi vérifiable en Europe.Parti ainsi du constat que trop d'inégalités ne profitent à personne, Joseph Stiglitz décortique la question dans son ouvrage à travers des critiques de l'idéologie néolibérale et des propositions de réformes. inégalités fabriquées et entretenues par le 1 %Stiglitz expose une situation des plus critiques il montre qu'une partie infime de la population peut détenir une part conséquente des richesses, et maintenir ses intérêts à tout prix, au détriment de la majorité. C'est le constat qu'il fait aux États-Unis les richesses ruissellent non pas du haut vers le bas, via la redistribution et une imposition progressive, mais du bas vers le haut ; les 1 % les plus riches vampirisent les ressources grâce à différents moyens par exemple, ils influencent les décisions du Congrès afin de ne jamais faire passer les amendements en faveur de plus de redistribution les candidats les plus progressistes sont systématiquement évincés par le lobbyisme. À la place, les libéraux-conservateurs placent leurs pions, sur la recommandation du 1 %, et entretiennent une croyance dangereuse leurs intérêts sont les intérêts des 99 % restants. Ainsi, les choses risquent difficilement de changer ; le pire étant que les classes populaires sont celles qui se mobilisent le moins pour aller voter, en pensant que la politique ne peut de toute façon rien pour eux. Ils subissent de fait une asymétrie d'informations car les plus riches, au contraire, sont bien conscients de leurs intérêts. De plus en plus, comme le rappelle l'auteur, le système politique glisse d'un principe une voix, un vote » à un dollar, un vote ». Ce triste constat n'est pas moins vrai dans notre pays comme le prouve le programme en faveur des plus riches du président E. les classes moyennes et populaires auraient beaucoup à dire en se manifestant leurs conditions de vie se dégradent tandis que les très hautes fortunes se multiplient, atteignant des sommets. En témoigne le coût faramineux de l'éducation aux États-Unis, dans un pays qui se prétend être le héraut de l'égalité des chances. En effet, les étudiants doivent contracter des prêts auprès de banques privées pour espérer poursuivre dans l'éducation supérieure, ce qui les endette sur des décennies. Ce système profite à ceux qui ont déjà des revenus conséquents, et entretient donc l'inégalité des chances sur le long terme. Malheureusement, l'élitisme reste fortement ancré dans un pays partant sur le principe que chaque homme est libre et égal aux autres, entretenant l'idée que la pauvreté est, finalement, une condition choisie. Cela fait que la protection sociale est minime et souvent inabordable pour les plus précaires. Si la situation française n'est pas tout à fait comparable, il ne faut nier le coût important de certaines formations écoles de commerce, écoles d'art... et leurs conséquences sur l'inégalité des le triste constat aux États-Unis qu'établit l'auteur est l'hégémonie de la pensée du 1 %. Celui-ci a tout intérêt à souhaiter une réduction de l'État, quitte à vanter la liberté totale des marchés qui ont plus d'une fois prouvé leur incapacité à s'autoréguler krach boursier de 1929, crise des subprimes de 2008.... Pour ce faire, les penseurs du néolibéralisme n'hésitent pas à brandir les échecs du communisme, peur particulièrement virulente dans un pays qui l'a combattu de longue date, n'ayant aucun scrupule à faire l'amalgame avec le socialisme. Ce mythe selon lequel il n'existe pas d'alternative au libéralisme est ensuite relayé par les organes de presse, que possèdent bien souvent les grands patrons du 1 %. Le moindre pas vers plus d'égalités soulève immédiatement un tollé chez eux, qui crient au communisme et à la désincitation de faire du profit et soutenir la croissance. Ces arguments caricaturaux sont utilisés par les libéraux contre B. Sanders aux USA, P. Iglesias en Espagne, J. Corbyn au Royaume-Uni, ou encore contre la France Insoumise en France. Pourtant, comme nous allons le voir, plus d'égalités profiteraient à mesures possibles pour limiter les inégalitésIl revient d'abord d'éclipser les doutes sur le mythe des inégalités. Certes, celles-ci ne peuvent disparaître et une égalité absolue serait absurde. Il n'en reste pas moins que les inégalités nuisent à la croissance et à la cohésion sociale. D'une part, les classes moyennes et précaires, qui représentent une majorité écrasante, sont les rouages de l'économie. Stimuler la consommation en augmentant leurs salaires produirait bien plus de richesses qu'augmenter le salaire des PDG – le problème n'étant pas les hauts salaires, mais le fait qu'ils sont multipliés alors même que la précarité se multiplie et que certains patrons licencient en même temps. Par exemple, Stiglitz a théorisé ce qu'on appelle le salaire d'efficience un salaire élevé motive les travailleurs à fournir une productivité maximale, là où la hausse du salaire patronal ne fait qu'augmenter le sentiment d'injustice dans une conjoncture difficile. D'autre part, trop d'inégalités effrite la cohésion sociale hausse de la criminalité, hausse du taux d'abstention, richesses monopolisées par une minorité qui rejette toute solidarité et œuvre pour contribuer toujours moins. On pourrait dire la même chose de la situation en France aux élections présidentielles, et encore davantage aux législatives, la participation des classes populaires est toujours plus ténue, ou contribue d'une poussée du Front second lieu, et contrairement à ce qu'en pense la doxa en place, l'État devrait plus que jamais assurer son rôle redistributeur. Tout d'abord en augmentant l'impôt sur les successions et en assurant la progressivité de l'impôt. Le manque à gagner représente plusieurs milliards de dollars – mais cet enseignement est aussi valable en Europe – et pourrait par exemple permettre de réinvestir dans l'éducation, la santé ou l'aide aux plus démunis. Par ailleurs, il devrait se montrer intransigeant envers les fraudes et pratiques vautours des banques, consistant à maximiser leurs profits en vendant des titres pourris aux ménages à bas revenus. C'est ce type de pratique qui a provoqué l'effondrement des titres à la veille de la crise de 2008, car ces titres ne valaient en fait rien. Le problème est que l'État indemnise systématiquement ces banques, ces dernières profitant de leur filet de sécurité car elles sont soit disant trop importantes pour faire faillite » too big to fail ». L'État, comme il l'a déjà fait par le passé, devrait laisser ces banques mourir pour envoyer un signal au monde dernier lieu, l'auteur expose une série de réformes urgentes pour améliorer la lutte contre les inégalités et exalter la croissance empêcher les sociétés financières de prendre des risques aux dépens des 99 % ; rendre les banques plus transparentes pour éviter qu'elles créent, selon l'expression de Warren Buffett, des armes financières de destruction massive » ; veiller à la concurrence bancaire pour empêcher les banques de trouver de nouveaux moyens de s'enrichir au détriment du consommateur et du commerçant ; limiter l'usure le prêt à des taux extrêmement élevés ; juguler les bonus qui encouragent la prise de risque ; et enfin, fermer les paradis fiscaux qui témoignent d'un refus de solidarité dans un contexte économique difficile pour tous. La France Insoumise le combat pour l'égalitéLes propositions du prix Nobel de l'économie se retrouvent donc assez largement dans le programme de la France Insoumise hausse des salaires et des pensions, mise au pas de la finance, création d'un véritable pôle public bancaire, lutte contre l'accumulation des richesses en instaurant un salaire maximum dans les entreprises 20 fois le salaire minimum de cette même entreprise, gratuité de l'enseignement universitaire et scolaire...L'égalité n'est pas donc simplement un mot ou une idée, c'est aussi un combat qui mérite d'être mené. Dans cette bataille pour le mieux-vivre, nous pouvons compter, entre-autre, sur les propositions de J. Stiglitz et sur la détermination des députés de la France Insoumise. commissionThématique 3 Nos missions La pratique sportive constitue un réel facteur de cohésion sociale et de déterminant de santé. Elle favorise et renforce les liens sociaux et elle est porteuse de bienfaits indéniables pour la santé. À travers cette commission thématique, la Conférence Régionale du Sport souhaite développer le sport pour toutes et tous, []403 ERROR The Amazon CloudFront distribution is configured to block access from your country. We can't connect to the server for this app or website at this time. There might be too much traffic or a configuration error. Try again later, or contact the app or website owner. If you provide content to customers through CloudFront, you can find steps to troubleshoot and help prevent this error by reviewing the CloudFront documentation. Generated by cloudfront CloudFront Request ID n8PRkecJ3nSMsVXEFzybG2_4hgQ1_1fuuNhCThIE0tG62Sg1VlsALg==
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