Fichede lecture ; supplĂ©ment au voyage de Bougainville, de Denis Diderot ; analyse complĂšte de l'oeuvre et rĂ©sumĂ© . Fiche de lecture ; supplĂ©ment au voyage de Bougainville, de Denis Diderot ; analyse complĂšte de l'oeuvre et rĂ©sumĂ© . Fiche; Autres Ă©ditions(1) 0 note . Fanny Normand. Date de parution : 22/04/2014; Editeur :Diderot, SupplĂ©ment au voyage de Bougainville - Pleurez, malheureux tahitiens !» Analyse d'un Ă©lĂšve sur le discours du texte les mĂ©faits de la civilisation et l'Ă©loge de la vie sauvage. DerniĂšre mise Ă jour 16/03/2021 âą ProposĂ© par zetud Ă©lĂšve Texte Ă©tudiĂ© Pleurez, malheureux Tahitiens ! pleurez ; mais que ce soit de l'arrivĂ©e, et non du dĂ©part de ces hommes ambitieux et mĂ©chants un jour, vous les connaĂźtrez mieux. Un jour, ils reviendront, le morceau de bois que vous voyez attachĂ© Ă la ceinture de celui-ci, dans une main, et le fer qui pend au cĂŽtĂ© de celui-lĂ , dans l'autre, vous enchaĂźner, vous Ă©gorger, ou vous assujettir Ă leurs extravagances et Ă leurs vices ; un jour vous servirez sous eux, aussi corrompus, aussi vils, aussi malheureux qu'eux. Mais je me console ; je touche Ă la fin de ma carriĂšre ; et la calamitĂ© que je vous annonce, je ne la verrai point. O Tahitiens ! mes amis ! vous auriez un moyen d'Ă©chapper Ă un funeste avenir ; mais j'aimerais mieux mourir que de vous en donner le conseil. Qu'ils s'Ă©loignent, et qu'ils vivent." Puis s'adressant Ă Bougainville, il ajouta "Et toi, chef des brigands qui t'obĂ©issent, Ă©carte promptement ton vaisseau de notre rive nous sommes innocents, nous sommes heureux ; et tu ne peux que nuire Ă notre bonheur. Nous suivons le pur instinct de la nature ; et tu as tentĂ© d'effacer de nos Ăąmes son caractĂšre. Ici tout est Ă tous ; et tu nous as prĂȘchĂ© je ne sais quelle distinction du tien et du mien. Nos filles et nos femmes nous sont communes ; tu as partagĂ© ce privilĂšge avec nous ; et tu es venu allumer en elles des fureurs inconnues. Elles sont devenues folles dans tes bras ; tu es devenu fĂ©roce entre les leurs. Elles ont commencĂ© Ă se haĂŻr; vous vous ĂȘtes Ă©gorgĂ©s pour elles ; et elles nous sont revenues teintes de votre sang. Nous sommes libres ; et voilĂ que tu as enfoui dans notre terre le titre de notre futur esclavage. Tu n'es ni un dieu, ni un dĂ©mon qui es-tu donc, pour faire des esclaves ? Orou ! toi qui entends la langue de ces hommes-lĂ , dis-nous Ă tous, comme tu me l'as dit Ă moi, ce qu'ils ont Ă©crit sur cette lame de mĂ©tal Ce pays est Ă nous. Ce pays est Ă toi ! et pourquoi ? parce que tu y as mis le pied ? Si un Tahitien dĂ©barquait un jour sur vos cĂŽtes, et qu'il gravĂąt sur une de vos pierres ou sur l'Ă©corce d'un de vos arbres Ce pays appartient aux habitants de Tahiti, qu'en penserais-tu ?... Tu n'es pas esclave tu souffrirais la mort plutĂŽt que de l'ĂȘtre, et tu veux nous asservir ! Tu crois donc que le Tahitien ne sait pas dĂ©fendre sa libertĂ© et mourir ? Celui dont tu veux t'emparer comme de la brute, le Tahitien est ton frĂšre. Vous ĂȘtes deux enfants de la nature ; quel droit as-tu sur lui qu'il n'ait pas sur toi ? Tu es venu ; nous sommes-nous jetĂ©s sur ta personne ? avons-nous pillĂ© ton vaisseau ? t'avons-nous saisi et exposĂ© aux flĂšches de nos ennemis ? t'avons-nous associĂ© dans nos champs au travail de nos animaux ? Nous avons respectĂ© notre image en toi. "Laisse nous nos moeurs ; elles sont plus sages et honnĂȘtes que les tiennes ; nous ne voulons plus troquer ce que tu appelles notre ignorance contre tes inutiles lumiĂšres. Tout ce qui nous est nĂ©cessaire et bon, nous le possĂ©dons. Sommes-nous dignes de mĂ©pris, parce que nous n'avons pas su nous faire des besoins superflus ? Lorsque nous avons faim, nous avons de quoi manger ; lorsque nous avons froid, nous avons de quoi nous vĂȘtir. Tu es entrĂ© dans nos cabanes, qu'y manque-t-il, Ă ton avis ? Poursuis jusqu'oĂč tu voudras ce que tu appelles les commoditĂ©s de la vie ; mais permets Ă des ĂȘtres sensĂ©s de s'arrĂȘter, lorsqu'ils n'auraient Ă obtenir, de la continuitĂ© de leurs pĂ©nibles efforts, que des biens imaginaires. Si tu nous persuades de franchir l'Ă©troite limite du besoin, quand finirons-nous de travailler ? Quand jouirons-nous ? Nous avons rendu la somme de nos fatigues annuelles et journaliĂšres la moindre qu'il Ă©tait possible, parce que rien ne nous paraĂźt prĂ©fĂ©rable au repos. Va dans ta contrĂ©e t'agiter, te tourmenter tant que tu voudras ; laisse-nous reposer ne nous entĂȘte ni de tes besoins factices, ni de tes vertus chimĂ©riques. Diderot, SupplĂ©ment au voyage de Bougainville - Pleurez, malheureux tahitiens !» Bougainville est un homme du XVIIIĂšme siĂšcle qui a entreprit un tour du monde entre 1766 et 1769. A son retour, il publie le voyage autour du monde et en 1772, Diderot rĂ©agit en Ă©crivant le supplĂ©ment au voyage de Bougainville dans lequel il sâintĂ©resse exclusivement Ă la halte tahitienne. Le supplĂ©ment au voyage de Bougainville peut apparaĂźtre comme un Ă©loge de la vie sauvage mais câest aussi rĂ©vĂ©lateur des interrogations de Diderot sur la sociĂ©tĂ© du XVIIIĂšme siĂšcle. Dans le chapitre 2, Diderot met en scĂšne un vieillard, sorte de patriarche. Il fait un double discours dâune part adressĂ© aux tahitiens, dâautre part Ă Bougainville. La deuxiĂšme partie du discours est un rĂ©quisitoire dans lequel Diderot oppose les deux civilisations. I - Les mĂ©faits de la civilisation Les propos du vieillard sont intĂ©ressants car il Ă©voque les beaux jours de son pays. Câest parce que le monde originel disparaĂźt que le vieillard se lance dans une violente diatribe contre la civilisation. 1. LâarrivĂ©e des europĂ©ens entraĂźne la violence. La cruautĂ© et la destruction ont Ă©tĂ© apportĂ©s par les EuropĂ©ens on peut relever le champ lexical de la violence Ă©gorger », assujettir », sang », haĂŻr »⊠Lâutilisation de ces termes nĂ©gatifs permet de tracer un tableau extrĂȘmement critique mais rĂ©aliste du comportement des europĂ©ens, cela permet de percevoir lâavenir malheureux des tahitiens. 2. Bougainville sujet de mĂ©pris Le discours lui est directement adressĂ© interpellation violente Et toi chef des brigands »l15. Il est assimilĂ© Ă un animal fĂ©roce l21, il est lâincarnation du mal l23, câest un ĂȘtre orgueilleux ce pays est Ă toi ! Et pourquoi ? » l25. Il agit comme un criminel tu tâes vengĂ© » l29. Bougainville est un ingrat Nos filles et nos femmes nous sont communes ; tu as partagĂ© ce privilĂšge avec nous ; et tu es venu allumer en elles des fureurs inconnues »l19-20, il sĂšme le trouble. Le vieillard dĂ©plore le mĂ©pris dont ils ont Ă©tĂ© lâobjet sommes-nous dignes de mĂ©pris »l38 Les hommes paraissent extrĂȘmement corrompus »l11 Câest un tableau pessimiste de la sociĂ©tĂ© du XVIIIĂšme siĂšcle et de son reprĂ©sentant Bougainville. 3. La premiĂšre cause du mal la propriĂ©tĂ© Ceci apparaĂźt l18 ici tout est Ă tous ; et tu nous as prĂȘchĂ© je ne sait quelle distinction du tien et du mien. ». On retrouve cette thĂšse chez Rousseau dans le discours sur lâĂ©nigme de lâinĂ©galitĂ© parmi les hommes. Câest une idĂ©e commune aux philosophes. La suite des propos du vieillard tient Ă nier le bien fondĂ© de cette appropriation. La question oratoire ce pays est Ă toi ! Et pourquoi ? »l25 permet dâattirer lâattention du lecteur sur le comportement inadmissible du colonisateur. Le vieillard imagine un retournement de situation l26-27, celui-ci paraĂźt incroyable, cela permet de souligner le comportement inadmissible des occidentaux. 4. La sociĂ©tĂ© des lumiĂšres fortement dĂ©criĂ©e Il suffit de sâattacher au vocabulaire extravagance »l10, corrompus », malheureux »l11, mĂ©prisables bagatelles »l28, inutiles lumiĂšres »l38, vertus chimĂ©riques »l47. Lâinterrogation rhĂ©torique sommes-nous dignes de mĂ©pris parce que nous nâavons pas su nous faire des besoins superflus » l38 renvoie lâEurope Ă sa propre misĂšre. La civilisation europĂ©enne repose sur lâartifice elle sâoppose totalement avec la vie sauvage. On peut relever un constant parallĂ©lisme entre les deux civilisations. II - Eloge de la vie sauvage 1. La vie naturelle est basĂ©e sur lâinnocence Nous sommes innocents »l16 ceci parce quâils vivent en harmonie avec la nature nous suivons le pur instinct de la nature »l17. Cette innocence repose sur la communautĂ© ici tout est Ă tous »l17. Cette communautĂ© Ă©vite rivalitĂ© et violence. Lâinnocence transparaĂźt aussi dans les mĆurs laisse-nous nos mĆurs ; elles sont plus sages et plus honnĂȘtes que les tiennes »l36 On a le sentiment que lâinnocence est liĂ©e au bonheur. Bonheur essentiel au philosophe des LumiĂšres. 2. LibertĂ©, tolĂ©rance Nous sommes libres »l22 affirmation catĂ©gorique. Cette libertĂ© sâoppose Ă lâesclavage enchaĂźnerr, assujettir »l10, notre futur esclavage »l23, tu nâes pas esclave »l30. Lorsque le vieillard Ă©voque lâesclavage, il est virulent points dâexclamation. Le Tahitien est prĂȘt Ă dĂ©fendre sa libertĂ© au prix de sa vie tu crois donc que le Tahitien ne sait pas dĂ©fendre sa libertĂ© et mourir ! »l32 3. Accueillants Nos filles et nos femmes nous sont communes ; tu as partagĂ© ce privilĂšge avec nous »l19 lâemploi du terme privilĂšge » montre la qualitĂ© de lâaccueil. La sĂ©rie de questions l34-35 montre que les Tahitiens se sont conduits de maniĂšre hospitaliĂšre. Respect »35 les Tahitiens est respectueux de lâautre, mais lâEuropĂ©en ne lâest pas. EgalitĂ© entre les hommes frĂšres », enfants de la nature »l33 4. SimplicitĂ© de leur existence Leur existence et leurs dĂ©sirs sont limitĂ©s aux besoins immĂ©diats faim », froid » Lâabsence de superflus est important tout ce qui est nĂ©cessaire et bon nous le possĂ©dons »l38 Le vieillard Ă©voque une vie authentique aux antipodes de la vie civilisĂ©e. Il y a de la sagesse, une morale de contentement dans ses propos. Conclusion Diderot prĂ©sente une vision nĂ©gative sur la civilisation Ă travers les yeux du vieillard. Câest Ă lâopposĂ© de la vie naturelle. Ce texte illustre la quĂȘte du bonheur des philosophes du XVIIIĂšme. Cela nous renvoie au mythe du bon sauvage », Ă lâidĂ©e dâun ailleurs meilleur, Ă lâidĂ©e dâune sociĂ©tĂ© originelle non corrompue. Câest une sorte de philosophie Ă©picurienne dans les propos du vieillard.
Cettefiche de lecture sur Le Supplément au Voyage de Bougainville de Diderot a été rédigée par un professeur de français. A PROPOS DE LA COLLECTION La série des contenus éducatifs aux étudiants et aux professeurs tels que : des résumés, des analyses littéraires, des questionnaires et des commentaires sur la littérature moderne et
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Discoursdu vieillard, Supplément au voyage de Bougainville, Diderot : analyse. Voici un commentaire du « discours du vieux tahitien », extrait du chapitre 2 du Supplément au voyage de Bougainville de Diderot ( publié
SupplĂ©ment au voyage de INTRODUCTIONLe SupplĂ©ment au voyage de Bougainville ou Dialogue entre A et B sur lâinconvĂ©nient dâattacher des idĂ©es morales Ă certaines actions physiques qui nâen comportent pas est un conte philosophique Ă©crit par Denis Diderot 1713-1784, publiĂ© en volume pour la premiĂšre fois en 1796, donc aprĂšs la mort de lâĂ©crivain et philosophe sâinscrit dans un triptyque de contes moraux rĂ©digĂ©s en 1722. Il est donc prĂ©cĂ©dĂ© de Ceci nâest pas un conte et de Madame de la RESUME DE LâĆUVREChapitre I Jugement du voyage de BougainvilleLe dialogue sâouvre sur deux personnages qui attendent que le brouillard se lĂšve pour pouvoir continuer leur pĂ©riple. Leurs Ă©changes semblent ĂȘtre la suite dâune conversation dĂ©jĂ entamĂ©e. Deux personnages, A et B, discutent du SupplĂ©ment au Voyage autour du monde Ă©crit par Bougainville, que B est en train de lire. A nâa pas lu lâĆuvre, câest pourquoi il pose de nombreuses questions sur le voyage de Bougainville et la personnalitĂ© de celui-ci. Les rĂ©ponses de B nous apprennent que Bougainville Ă©tait un homme curieux qui passe dâune vie sĂ©dentaire et de plaisirs au mĂ©tier actif, pĂ©nible, usant et dissipĂ© du voyageur ». Suite aux informations sur le pĂ©riple lui-mĂȘme, B prĂ©sente Ă A les difficultĂ©s rencontrĂ©es, les maladies, le difficile accĂšs aux secours, etc. Ensuite sont dĂ©veloppĂ©es des rĂ©flexions sur quelques Ă©vĂšnements marquants du voyage les JĂ©suites en Uruguay, la dĂ©stabilisation des Patagons, ou encore la question des sauvages ». Enfin, Aotourou est introduit ; B rappelle quâil sâagit dâun Tahitien qui a accompagnĂ© Bougainville Ă Paris, permettant une vĂ©ritable rĂ©flexion sur les diffĂ©rences de mĆurs entre sociĂ©tĂ©s. Le Chapitre I se clĂŽt sur la levĂ©e du brouillard, qui permet aux personnages de repartir. B encourage une derniĂšre fois son compagnon Ă lire la suite du rĂ©cit Tenez, lisez⊠». Câest par cette ouverture que Diderot peut prĂ©senter la suite du rĂ©cit comme un extrait de celui de II les adieux du vieillard
RĂ©sumĂ© Deux personnages, A et B, dialoguent de l'oeuvre de Louis Antoine de Bougainville, Voyage autour du monde, tout juste paru. Mais B propose ensuite de parcourir le prĂ©tendu SupplĂ©ment au voyage de Bougainville IUn dialogue mystĂ©rieux sur Voyage au bout du monde L'extrait prĂ©sente un dialogue entre deux personnages dĂ©signĂ©s seulement par les lettres A et B. On ne sait pas oĂč a lieu le dialogue. On ne sait pas qui sont les personnages. Apparemment ils sont dehors "sous la voĂ»te Ă©toilĂ©e", assis prĂšs d'une table. Ils parlent du voyage de Bougainville et du rĂ©cit de voyage qu'il a publiĂ© en 1771. On remarque la mention faite au "brouillard", peut-ĂȘtre est-on le matin. Les personnages dĂ©battent autour de l'Ćuvre de Bougainville. Le dĂ©bat porte sur l'homme "Je n'entends rien Ă cet homme-lĂ ", sur son livre "Que pensez-vous de son voyage ?", sur le style "Et son style". Ils citent des passages cĂ©lĂšbres "l'Ăźle des Lanciers", "les Patagons", "Aotourou". IILes personnages, des prĂ©textes Les personnages sont anonymes. Juste deux lettres. La situation d'Ă©nonciation apprend au lecteur qu'ils sont EuropĂ©ens. Ce sont apparemment de grands lecteurs. Il lisent les philosophes. Ce choix permet Ă Diderot de s'intĂ©resser essentiellement aux thĂšses qu'il aborde. Il n'est pas intĂ©ressĂ© par les personnages mais par leurs idĂ©es. Le lien entre les deux hommes rappelle les relations au XVIIIe siĂšcle. Ils font allusion Ă une "promenade" survenue la veille du dialogue. IIILa relation des personnages A et B ont des avis divergents. Par exemple, ils sont divisĂ©s sur la prĂ©vision du temps de la journĂ©e A pense que le ciel sera dĂ©gagĂ©, B dit qu'il faut ĂȘtre prudent. L'opposition est marquĂ©e par des connecteurs logiques "Il est vrai", "mais", "Mais si au contraire". A semble avoir des certitudes, B est celui qui doute "Qu'en savez-vous ?". Les deux personnages ont le mĂȘme nombre de rĂ©pliques. C'est B pourtant qui domine en gĂ©nĂ©ral. Chaque fois, c'est lui qui a le dernier mot. A questionne, B rĂ©pond. Mais A commente aussi les rĂ©ponses de B. Ils sont dans l'Ă©change. On peut parler de dialectique entre les deux personnages qui sont au mĂȘme niveau. Ils dĂ©battent, ils ne sont pas virulents. On peut aussi voir ce couple diffĂ©remment. B est le double de Diderot, le professeur, le philosophe. A reprĂ©sente l'Ă©lĂšve ou le lecteur. IVL'importance des sciences Le vocabulaire est assez technique "partie infĂ©rieure de l'atmosphĂšre", "chargĂ©e d'humiditĂ©", "il traverse l'Ă©ponge", "rĂ©gion supĂ©rieure", "air moins dense", "saturĂ©". Les personnages font rĂ©fĂ©rence aux chimistes "comme disent les chimistes". Ils montrent de l'intĂ©rĂȘt pour les mathĂ©matiques, comme avec cette rĂ©fĂ©rence Ă l'article de Bougainville sur les calculs diffĂ©rentiels. Ils sont aussi intĂ©ressĂ©s par la gĂ©ographie avec les explorations Ă©vocation de cartes de gĂ©ographie. VLa philosophie des LumiĂšres Ce texte est reprĂ©sentatif du siĂšcle des LumiĂšres. Le personnage de Boungainville reprĂ©sente les contradictions de l'Ă©poque, l'aventurier, le sĂ©dentaire, le mondain et l'homme du dehors. Ces contradictions se voient bien dans le chiasme suivant "il se dissipe aprĂšs s'ĂȘtre appliquĂ©, et s'applique aprĂšs s'ĂȘtre dissipĂ©". Le dĂ©bat porte sur la constance de l'Homme. Pour B, il est normal d'ĂȘtre inconstant, tout le monde l'est "il fait comme tout le monde". On retrouve l'idĂ©e d'un monde en perpĂ©tuel changement "tourbillon du monde", "Ă©lĂ©ment sur lequel il a Ă©tĂ© ballottĂ©". Le dialogue donne une dĂ©finition du philosophe des LumiĂšres. Ce n'est pas un homme qui doit se retirer du monde, au contraire il doit en faire partie. C'est un homme curieux qui dĂ©couvre de nouveaux mondes. C'est un homme qui aime la science et le savoir "est parti avec les lumiĂšres nĂ©cessaires et les qualitĂ©s propres Ă sa vue de la philosophie, du courage, de la vĂ©racitĂ©âŠ", "le dĂ©sir de voir, de s'Ă©clairer et d'instruire", "une meilleure connaissance de notre vieux domicile", "plus de correction dans nos cartes gĂ©ographiques". C'est un homme qui observe "un coup d'Ćil prompt qui saisit les choses et abrĂšge le temps des observations". Le champ lexical des LumiĂšres est dĂ©veloppĂ© "lumiĂšres", "vues", "coup d'Ćil", "observations", "circonspection", "dĂ©sir de voir", "s'Ă©clairer". En quoi ce texte est-il reprĂ©sentatif des LumiĂšres ?I. Un dĂ©batII. L'importance du savoirIII. Un dĂ©finition du philosopheQuelle est la relation entre A et B ?I. Des amisII. Des reprĂ©sentants des LumiĂšresIII. Une relation philosophe-Ă©lĂšve ?En quoi cet incipit est-il dĂ©routant ?I. Une situation d'Ă©nonciation mystĂ©rieuseII. Des personnages dans l'attenteIII. Un dĂ©bat philosophique Quefaut-il retenir du SupplĂ©ment au Voyage de Bougainville, le conte philosophique qui a plongĂ© les lecteurs au coeur de Tahiti ? Retrouvez tout ce que vous devez savoir sur SUPPLĂMENT AU VOYAGE DE BOUGAINVILLE. Dialogue philosophique de Denis Diderot 1713-1784, dont le titre complet est SupplĂ©ment au Voyage de Bougainville, ou Dialogue entre A et B sur lâinconvĂ©nient dâattacher des idĂ©es morales Ă certaines actions physiques qui nâen comportent pas, publiĂ© par lâabbĂ© Bourlet de Vauxcelles dans Opuscules philosophiques et littĂ©raires Ă Paris chez Chevet en 1796. Le discours de Polly Baker» III apparaĂźt pour la premiĂšre fois dans lâĂ©dition de Gilbert Chinard, donnĂ©e Ă GenĂšve chez Droz en 1935 dâaprĂšs le manuscrit de Leningrad. RĂ©sumĂ© du SupplĂ©ment au voyage de Bougainville Jugement du Voyage de Bougainville». Par un temps de brouillard, B rapporte avec enthousiasme Ă A les singularitĂ©s du rĂ©cit du navigateur et vante la vie naturelle des sauvages, quâillustre Aotourou, Tahitien amenĂ© en France. Un prĂ©tendu SupplĂ©ment au Voyage sera le garant de ses dires. Les Adieux du vieillard». Le SupplĂ©ment sâouvre sur le discours adressĂ© Ă Bougainville avant son dĂ©part par un vieux Tahitien, qui dĂ©nonce violemment les maux apportĂ©s dans lâĂźle par les EuropĂ©ens. LâEntretien de lâaumĂŽnier et dâOrou». Le SupplĂ©ment dit ensuite comment le Tahitien Orou rĂ©ussit Ă convaincre lâaumĂŽnier de lâĂ©quipage de passer la nuit avec sa fille et le questionna, le lendemain, sur ce Dieu dont les interdictions sexuelles sont contraires Ă la nature. Suit un discours, rapportĂ© par B, de Polly Baker, mĂšre cĂ©libataire condamnĂ©e pour libertinage. Suite de lâentretien de lâaumĂŽnier avec lâhabitant de Tahiti». Ă Tahiti oĂč la maternitĂ© est reine, poursuit Orou, seules sont jugĂ©es libertines les femmes stĂ©riles qui ont commerce avec des hommes. Câest lâintĂ©rĂȘt et non le devoir qui garantit lâordre public. Convaincu ou poli, lâaumĂŽnier honore successivement les autres filles et la femme de son hĂŽte. Suite du dialogue entre A et B». Face Ă A sceptique, B conclut que la loi de nature supplĂ©e aisĂ©ment aux codes religieux et civils, qui ont dĂ©naturĂ© lâunion des sexes. Mais il vaut mieux se conformer aux lois de son pays plutĂŽt que dâĂȘtre sage parmi les fous. Retour symbolique du beau temps. Analyse du SupplĂ©ment Une utopie critique InspirĂ©e par le Voyage autour du monde 1771 de Louis Antoine de Bougainville, lâĆuvre de Diderot participe du mirage ocĂ©anien» qui fit voir en Tahiti la nouvelle CythĂšre. Mais elle nâa rien dâun divertissement exotique ou grivois ; lâutopie tahitienne permet Ă lâauteur, comme lâindique le sous-titre, de mettre en cause le lien quâĂ©tablissent nos sociĂ©tĂ©s chrĂ©tiennes entre relations sexuelles et moralitĂ©. Ă ce titre, le SupplĂ©ment ne se conçoit pas sans Ceci nâest pas un conte et Madame de La CarliĂšre qui, portant sur la morale sexuelle, forment avec lui un triptyque. Les amours dĂ©sastreuses autant que policĂ©es des personnages de ces contes, citĂ©s Ă la fin du SupplĂ©ment, servent de prĂ©lude Ă lâĂ©vocation de la sexualitĂ© libre et heureuse des sauvages tahitiens, qui illustre la conciliation possible entre lâamour et les mĆurs. La rĂ©flexion morale dĂ©bouche ainsi, dans cette Ćuvre que lâon a parfois considĂ©rĂ©e comme lâexpression de la pensĂ©e ultime de Diderot, sur une thĂ©orie politique, fondĂ©e sur lâaccord entre les lois et la nature. Les mauvaises mĆurs ne sont pour Diderot que lâeffet dâune mauvaise lĂ©gislation en bridant les appĂ©tits naturels, les codes religieux et civil ont, dans lâEurope vieillissante, corrompu les mĆurs. La jeune sociĂ©tĂ© tahitienne, elle, a atteint ce point dâĂ©quilibre qui la situe Ă mi-chemin entre les rigueurs du primitivisme et la dĂ©gĂ©nĂ©rescence qui guette toute civilisation. On aurait tort, pourtant, de voir avec Vauxcelles dans le SupplĂ©ment une sans-culotterie» ; la conclusion» du texte nâa rien de rĂ©volutionnaire, qui Ă©dicte Nous parlerons contre les lois insensĂ©es jusquâĂ ce quâon les rĂ©forme, et en attendant nous nous y soumettrons.» Il paraĂźt difficile, en effet, au nom dâune illusoire cohĂ©rence de la pensĂ©e diderotienne, dâinterprĂ©ter lâĆuvre polyphonique quâest le SupplĂ©ment Ă la lumiĂšre de la seule diatribe anticolonialiste du vieillard ou mĂȘme de la sĂ©vĂšre critique faite par Orou de la morale chrĂ©tienne. Il ne faut pas oublier quâen 1772, au moment de la rĂ©daction du SupplĂ©ment, le philosophe mariait sa fille le plus bourgeoisement du monde. RĂȘverie Ă la maniĂšre de Diderot nous savons combien Ă©tait codifiĂ©e et hiĂ©rarchisĂ©e cette sociĂ©tĂ© tahitienne, le SupplĂ©ment Ă©nonce seulement lâhypothĂšse dâune autre organisation sociale, dont le philosophe tire ailleurs, dans lâHistoire des deux Indes, des consĂ©quences plus radicales. Ce que Diderot a en tĂȘte ici, Ă la veille de son dĂ©part pour Saint-PĂ©tersbourg, câest un projet de rĂ©forme applicable dans la toute jeune Russie, dont il fera Ă©tat dans ses MĂ©moires pour Catherine II. Une pensĂ©e en mouvement On a pu qualifier de baroque» lâart de Diderot et dĂ©celer dans lâarrangement, voire le contenu du SupplĂ©ment, des contradictions. Lâauteur semble, il est vrai, dĂ©fier toute logique en plaçant le discours dâadieu avant lâarrivĂ©e de lâĂ©quipage, en confondant dans le titre supplĂ©ment» et dialogue» qui alternent dans lâĆuvre, en prĂȘtant tour Ă tour Ă ses apparents porte-parole B? le vieillard? Orou? des discours divergents. Mais ne faut-il pas plutĂŽt voir dans cette structure Ă©clatĂ©e le signe dâune pensĂ©e en mouvement, favorisĂ©e par les vertus du dialogue et de la supplĂ©mentaritĂ© ? Les cinq sections du SupplĂ©ment, qui sâarticulent fermement autour dâune lecture de Bougainville, abordent les mĂȘmes thĂšmes libertĂ©, propriĂ©tĂ©, comportement matrimonial..., mais les orchestrent diffĂ©remment. Si la conversation initiale exalte Ă travers Bougainville les LumiĂšres, le discours du vieillard lui oppose la corruption europĂ©enne, qui appelle un remĂšde, proposĂ© par Orou dans lâentretien avec lâaumĂŽnier la conversion aux lois de la nature. Ă la fin du dialogue entre A et B, le directeur de lâEncyclopĂ©die, disant son dernier mot, rĂ©affirme sa foi dans le progrĂšs, quâil avait mise entre parenthĂšses pour abandonne[r] [son] esprit Ă tout son libertinage» dĂ©but du Neveu de Rameau. En cela il se distingue du Rousseau des Discours, dont la critique morale est sous-tendue par une volontĂ© de rĂ©forme politique. Le thĂšme central du SupplĂ©ment nâest pas neuf. Depuis Montaigne, les philosophes nuds» avaient fait florĂšs dans la littĂ©rature française et le SupplĂ©ment vĂ©hicule bien des idĂ©es rĂ©pandues chez les contemporains de Diderot le populationnisme, par exemple. LâoriginalitĂ© de Diderot rĂ©side dans lâaccent quâil met sur le caractĂšre physiologique de lâamour. Câest sans doute ce qui explique le retentissement de lâĆuvre, qui inspira Ă Musset quelques strophes du poĂšme âSouvenirâ, ne fut pas Ă©trangĂšre aux thĂšses du socialiste Paul Lafargue sur le droit Ă la paresse» et fut lâobjet dâun pastiche de Giraudoux, le SupplĂ©ment au Voyage de Cook 1935. ALBERTAN-COPPOLA, in Dictionnaire des oeuvres littĂ©raires de langue française. © Bordas, Paris 1994 Plus d'articles Fiche Les lumiĂšres XVIIIe siĂšcle Bac de français Pour aller plus loin SupplĂ©mentau voyage de Bougainville AU VOYAGE DE BOUGAINVILLE (FICHE DE LECTURE) 2 I. INTRODUCTION II. RESUME DE LâĆUVRE Chapitre I : Jugement du voyage de Bougainville Chapitre II : les adieux du vieillard Chapitre III : Entretien de lâaumĂŽnier et dâOrou Chapitre IV : Suite de lâentretien de lâaumĂŽnier et avecLe conte philosophique SupplĂ©ment au voyage de Bougainville » a Ă©tĂ© Ă©crit par Denis Diderot, grand Philosophe du siĂšcle des LumiĂšre. Dans cette Ćuvre, Diderot sâappuie sur le rĂ©cit du voyage au tour du monde de Louis Antoine de Bougainville, navigateur et explorateur Français,pour soulever le problĂšme du colonialisme, et en particulier dans lâextrait Ă©tudiĂ©, pour dĂ©noncer les souffrances que Bougainville et son Ă©quipage ont infligĂ© au peuple Tahitien, pendant leur sĂ©jour sur lâĂźle. Denis Diderot met n scĂšne un vieillard de la tribu Tahitienne, probablement le sage » de la tribu, prononçant un discours violent Ă lâencontre de Bougainville et ses hommes. Les nombreux arguments utilisĂ©s dans ce discours, amĂšnent naturellement le lecteur Ă sâinterroger Swipe to page sur les mĂ©faits du col analyse lâopposition combat. On parle di Sni* to View donc dans cette e le discours de re car dans ce texte, Diderot oppose les qualit s de la culture Tahitienne contre les dĂ©fauts de la culture EuropĂ©enn EuropĂ©enne. Diderot prĂ©sente la culture Tahitienne comme es personnes qui mĂšnent une vie heureuse et naturelle nous somme libre », laisse nous nos mĆurs, elles sont plus sages et plus honnĂȘtes que les tiennes Ce peuple possĂšde des valeurs positives comme le respect des autres, le partage, la fraternitĂ© Contrairement aux Tahitiens, Diderot qualifie les hommes de Bougainville comme des personnes qui ont pour valeurs la violence, la possession, le superflu. Diderot met en scĂšne le vieillard qui Ă pour rĂŽle de montrer lâabsurditĂ© du comportement des EuropĂ©ens. Cette injustice se traduit par application de la loi du plus fort dĂšs lâarrivĂ© des colonisateur sur le territoire Tahitien et cette loi du plus fort et en total opposition avec les idĂ©es de Diderot qui dĂ©fend les lois naturelles. Le discours de combat prononcĂ© par le vieillard mis en scĂšne par Diderot qui sâadresse Ă Bougainville est divisĂ© en deux partie principale. Dans la premiĂšre partie, le vieillard dĂ©nonce lâinjustice, les mĂ©faits du colonialisme tu es le plus fort ? Et quâest ce que cela fait ? Quel droit as-tu sur lui quâil nâait pas sur toi ? On retien
SupplĂ©mentau Voyage de Bougainville [Denis Diderot] - fiche de lecture. 1 PRĂSENTATION SupplĂ©ment au Voyage de Bougainville [Denis Diderot], dialogue philosophique de DenisMarketplace Fiche de lecture Français Document Ă©lectronique Licence 3 pages Description voici une lecture analytique de mon Bac de 1Ăšre S , j'avais de trĂšs bonnes notes en français et ce document devrait ĂȘtre trĂšs utile Ce document ne correspond pas exactement Ă ce que vous recherchez ? Commandez votre document redigĂ© sur mesure depuis notre service Commander un document Commander un document ou bien via la recherche par mots-clĂ©s Ces documents pourraient vous intĂ©resser Nous utilisons des cookies afin de proposer une meilleure expĂ©rience aux Ă©tudiants et aux tuteurs. En cliquant sur OK vous acceptez nos bons cookies. đ
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Fichede cours en Français - Niveau : lycĂ©e (par Agathe). En savoir + sur comment rĂ©ussir sa synthĂšse sur le texte de diderot ? Rechercher : Rechercher : Comment rĂ©ussir sa synthĂšse sur le texte de Diderot ? Par Agathe | RĂ©digĂ© le 22 octobre 2007 | 8 minutes de lecture. Ressources Langues Français Niveau LycĂ©e 1Ăšre S Le SupplĂ©ment au Voyage deDenis DiderotSupplĂ©ment au voyage de BougainvilleGarnier, 1875-77 p. 193.â Voyage autour du monde par la frĂ©gatela BoudeuseuoDIALOGUE ENTRE A. ET lâinconvĂ©nient dâattacherdes idĂ©es morales Ă certaines actions physiquesqui nâen comportent pasAt quanto meliora monet, pugnantiaque istis,Dives opis Natura suĂŠ, tu si modo recteDispensare velis, ac non fugienda petendisImmiscere ! Tuo vitio rerumne labores,Nil referre putas ?Horat. Sat. lib. I, sat. ii, vers. 73 et seq.Ăcrit en 1772 â publiĂ© en 1796.IJUGEMENT DU VOYAGE DE Cette superbe voĂ»te Ă©toilĂ©e, sous laquelle nous revĂźnmes hier, et qui semblait nous garantir un beau jour, ne nous a pas Quâen savez-vous ?A. Le brouillard est si Ă©pais quâil nous dĂ©robe la vue des arbres Il est vrai ; mais si ce brouillard, qui ne reste dans la partie infĂ©rieure de lâatmosphĂšre que parce quâelle est suffisamment chargĂ©edâhumiditĂ©, retombe sur la terre ?A. Mais si au contraire il traverse lâĂ©ponge, sâĂ©lĂšve et gagne la rĂ©gion supĂ©rieure oĂč lâair est moins dense, et peut, comme disent leschimistes, nâĂȘtre pas saturĂ© ?B. Il faut attendre. A. En attendant, que faites-vous ?B. Je Toujours ce voyage de Bougainville ?B. Je nâentends rien Ă cet homme-lĂ . LâĂ©tude des mathĂ©matiques, qui suppose une vie sĂ©dentaire, a rempli le temps de ses jeunesannĂ©es ; et voilĂ quâil passe subitement dâune condition mĂ©ditative et retirĂ©e au mĂ©tier actif, pĂ©nible, errant et dissipĂ© de Nullement. Si le vaisseau nâest quâune maison flottante, et si vous considĂ©rez le navigateur qui traverse des espaces immenses,resserrĂ© et immobile dans une enceinte assez Ă©troite, vous le verrez faisant le tour du globe sur une planche, comme vous et moi letour de lâunivers sur votre Une autre bizarrerie apparente, câest la contradiction du caractĂšre de lâhomme et de son entreprise. Bougainville a le goĂ»t desamusements de la sociĂ©tĂ© ; il aime les femmes, les spectacles, les repas dĂ©licats ; il se prĂȘte au tourbillon du monde dâaussi bonnegrĂące quâaux inconstances de lâĂ©lĂ©ment sur lequel il a Ă©tĂ© ballottĂ©. Il est aimable et gai câest un vĂ©ritable Français lestĂ©, dâun bord,dâun traitĂ© de calcul diffĂ©rentiel et intĂ©gral, et de lâautre, dâun voyage autour du Il fait comme tout le monde il se dissipe aprĂšs sâĂȘtre appliquĂ©, et sâapplique aprĂšs sâĂȘtre Que pensez-vous de son Voyage ?B. Autant que jâen puis juger sur une lecture assez superficielle, jâen rapporterais lâavantage Ă trois points principaux une meilleureconnaissance de notre vieux domicile et de ses habitants ; plus de sĂ»retĂ© sur des mers quâil a parcourues la sonde Ă la main, et plusde correction dans nos cartes gĂ©ographiques. Bougainville est parti avec les lumiĂšres nĂ©cessaires et les qualitĂ©s propres Ă cesvues de la philosophie, du courage, de la vĂ©racitĂ© ; un coup dâĆil prompt qui saisit les choses et abrĂšge le temps des observations ;de la circonspection, de la patience ; le dĂ©sir de voir, de sâĂ©clairer et de sâinstruire ; la science du calcul, des mĂ©caniques, de lagĂ©omĂ©trie, de lâastronomie ; et une teinture suffisante dâhistoire Et son style ?B. Sans apprĂȘt ; le ton de la chose, de la simplicitĂ© et de la clartĂ©, surtout quand on possĂšde la langue des Sa course a Ă©tĂ© longue ?B. Je lâai tracĂ©e sur ce globe. Voyez-vous cette ligne de points rouges ?A. Qui part de Nantes ?B. Et court jusquâau dĂ©troit de Magellan, entre dans la mer Pacifique, serpente entre ces Ăźles formant lâarchipel immense qui sâĂ©tenddes Philippines Ă la Nouvelle-Hollande, rase Madagascar, le cap de Bonne-EspĂ©rance, se prolonge dans lâAtlantique, suit les cĂŽtesdâAfrique, et rejoint lâune de ses extrĂ©mitĂ©s Ă celle dâoĂč le navigateur sâest embarquĂ©. A. Il a beaucoup souffert ?B. Tout navigateur sâexpose, et consent de sâexposer aux pĂ©rils de lâair, du feu, de la terre et de lâeau mais quâaprĂšs avoir errĂ© desmois entiers entre la mer et le ciel, entre la mort et la vie ; aprĂšs avoir Ă©tĂ© battu des tempĂȘtes, menacĂ© de pĂ©rir par naufrage, parmaladie, par disette dâeau et de pain, un infortunĂ© vienne, son bĂątiment fracassĂ©, tomber, expirant de fatigue et de misĂšre, aux piedsdâun monstre dâairain qui lui refuse ou lui fait attendre impitoyablement les secours les plus urgents, câest une duretĂ© !âŠA. Un crime digne de Une de ces calamitĂ©s sur laquelle le voyageur nâa pas Et nâa pas dĂ» compter. Je croyais que les puissances europĂ©ennes nâenvoyaient, pour commandants dans leurs possessionsdâoutre-mer, que des Ăąmes honnĂȘtes, des hommes bienfaisants, des sujets remplis dâhumanitĂ©, et capables de compatirâŠB. Câest bien lĂ ce qui les soucie !A. Il y a des choses singuliĂšres dans ce voyage de Nâassure-t-il pas que les animaux sauvages sâapprochent de lâhomme, et que les oiseaux viennent se poser sur lui, lorsquâilsignorent le danger de cette familiaritĂ© ?B. Dâautres lâavaient dit avant Comment explique-t-il le sĂ©jour de certains animaux dans des Ăźles sĂ©parĂ©es de tout continent par des intervalles de mereffrayants ? Qui est-ce qui a portĂ© lĂ le loup, le renard, le chien, le cerf, le serpent ? B. Il nâexplique rien ; il atteste le Et vous, comment lâexpliquez-vous ?B. Qui sait lâhistoire primitive de notre globe ? Combien dâespaces de terre, maintenant isolĂ©s, Ă©taient autrefois continus ? Le seulphĂ©nomĂšne sur lequel on pourrait former quelque conjecture, câest la direction de la masse des eaux qui les a Comment cela ?B. Par la forme gĂ©nĂ©rale des arrachements. Quelque jour nous nous amuserons de cette recherche, si cela vous convient. Pour cemoment, voyez-vous cette Ăźle quâon appelle des Lanciers ? Ă lâinspection du lieu quâelle occupe sur le globe, il nâest personne qui nese demande qui est-ce qui a placĂ© lĂ des hommes ? quelle communication les liait autrefois avec le reste de leur espĂšce ? quedeviennent-ils en se multipliant sur un espace qui nâa pas plus dâune lieue de diamĂštre ?A. Ils sâexterminent et se mangent ; et de lĂ peut-ĂȘtre une premiĂšre Ă©poque trĂšs-ancienne et trĂšs-naturelle de lâanthropophagie,insulaire dâ Ou la multiplication y est limitĂ©e par quelque loi superstitieuse ; lâenfant y est Ă©crasĂ© dans le sein de sa mĂšre foulĂ©e sous les piedsdâune Ou lâhomme Ă©gorgĂ© expire sous le couteau dâun prĂȘtre ; ou lâon a recours Ă la castration des mĂąlesâŠB. Ă lâinfibulation des femelles ; et de lĂ tant dâusages dâune cruautĂ© nĂ©cessaire et bizarre, dont la cause sâest perdue dans la nuit destemps, et met les philosophes Ă la torture. Une observation assez constante, câest que les institutions surnaturelles et divines sefortifient et sâĂ©ternisent, en se transformant, Ă la longue, en lois civiles et nationales ; et que les institutions civiles et nationales seconsacrent, et dĂ©gĂ©nĂšrent en prĂ©ceptes surnaturels et Câest une des palingĂ©nĂ©sies les plus Un brin de plus quâon ajoute au lien dont on nous NâĂ©tait-il pas au Paraguay au moment mĂȘme de lâexpulsion des jĂ©suites ?B. Quâen dit-il ?B. Moins quâil nâen pourrait dire ; mais assez pour nous apprendre que ces cruels Spartiates en jaquette noire en usaient avec leursesclaves Indiens, comme les LacĂ©dĂ©moniens avec les Ilotes ; les avaient condamnĂ©s Ă un travail assidu ; sâabreuvaient de leur sueur,ne leur avaient laissĂ© aucun droit de propriĂ©tĂ© ; les tenaient sous lâabrutissement de la superstition ; en exigeaient une vĂ©nĂ©rationprofonde ; marchaient au milieu dâeux, un fouet Ă la main, et en frappaient indistinctement tout Ăąge et tout sexe. Un siĂšcle de plus, etleur expulsion devenait impossible, ou le motif dâune longue guerre entre ces moines et le souverain, dont ils avaient peu Ă peusecouĂ© lâautoritĂ©. A. Et ces Patagons, dont le docteur Maty et lâacadĂ©micien La Condamine ont fait tant de bruit ?B. Ce sont de bonnes gens qui viennent Ă vous, et qui vous embrassent en criant Chaoua ; forts, vigoureux,toutefois nâexcĂ©dant guĂšrela hauteur de cinq pieds cinq Ă six pouces ; nâayant dâĂ©norme que leur corpulence, la grosseur de leur tĂȘte et lâĂ©paisseur de avec le goĂ»t du merveilleux, qui exagĂšre tout autour de lui, comment lâhomme laisserait-il une juste proportion aux objets, lorsquâila, pour ainsi dire, Ă justifier le chemin quâil a fait, et la peine quâil sâest donnĂ©e pour les aller voir au loin ?A. Et du sauvage, quâen pense-t-il ?B. Câest, Ă ce quâil paraĂźt, de la dĂ©fense journaliĂšre contre les bĂȘtes, quâil tient le caractĂšre cruel quâon lui remarque quelquefois. Il estinnocent et doux, partout oĂč rien ne trouble son repos et sa sĂ©curitĂ©. Toute guerre naĂźt dâune prĂ©tention commune Ă la mĂȘmepropriĂ©tĂ©. Lâhomme civilisĂ© a une prĂ©tention commune, avec lâhomme civilisĂ©, Ă la possession dâun champ dont ils occupent les deuxextrĂ©mitĂ©s ; et ce champ devient un sujet de dispute entre Et le tigre a une prĂ©tention commune, avec lâhomme sauvage, Ă la possession dâune forĂȘt ; et câest la premiĂšre des prĂ©tentions, etla cause de la plus ancienne des guerres⊠Avez-vous vu le TaĂŻtien que Bougainville avait pris sur son bord, et transportĂ© dans cepays-ci ?B. Je lâai vu ; il sâappelait Aotourou. Ă la premiĂšre terre quâil aperçut, il la prit pour la patrie des voyageurs ; soit quâon lui en eĂ»timposĂ© sur la longueur du voyage ; soit que, trompĂ© naturellement par le peu de distance apparente des bords de la mer quâil habitait,Ă lâendroit oĂč le ciel semble confiner Ă lâhorizon, il ignorĂąt la vĂ©ritable Ă©tendue de la terre. Lâusage commun des femmes Ă©tait si bienĂ©tabli dans son esprit, quâil se jeta sur la premiĂšre EuropĂ©enne qui vint Ă sa rencontre, et quâil se disposait trĂšs-sĂ©rieusement Ă luifaire la politesse de TaĂŻti. Il sâennuyait parmi nous. Lâalphabet taĂŻtien nâayant ni b, ni c, ni d, ni f, ni g, ni q, ni x, ni y, ni z, il ne put jamaisapprendre Ă parler notre langue, qui offrait Ă ses organes inflexibles trop dâarticulations Ă©trangĂšres et de sons nouveaux. Il ne cessaitde soupirer aprĂšs son pays, et je nâen suis pas Ă©tonnĂ©. Le voyage de Bougainville est le seul qui mâait donnĂ© du goĂ»t pour une autrecontrĂ©e que la mienne ; jusquâĂ cette lecture, jâavais pensĂ© quâon nâĂ©tait nulle part aussi bien que chez soi ; rĂ©sultat que je croyais lemĂȘme pour chaque habitant de la terre ; effet naturel de lâattrait du sol ; attrait qui tient aux commoditĂ©s dont on jouit, et quâon nâa pas la mĂȘme certitude de retrouver Quoi ! vous ne trouvez pas lâhabitant de Paris aussi convaincu quâil croisse des Ă©pis dans la campagne de Rome que dans leschamps de la Beauce ?B. Ma foi, non. Bougainville a renvoyĂ© Aotourou, aprĂšs avoir pourvu aux frais et Ă la sĂ»retĂ© de son ĂŽ Aotourou ! que tu seras content de revoir ton pĂšre, ta mĂšre, tes frĂšres, tes sĆurs, tes maĂźtresses, tes compatriotes, que leurdiras-tu de nous ?B. Peu de choses, et quâils ne croiront Pourquoi peu de choses ?B. Parce quâil en a peu conçues, et quâil ne trouvera dans sa langue aucun terme correspondant Ă celles dont il a quelques Et pourquoi ne le croiront-ils pas ?B. Parce quâen comparant leurs mĆurs aux nĂŽtres, ils aimeront mieux prendre Aotourou pour un menteur, que de nous croire si En vĂ©ritĂ© ?B. Je nâen doute pas la vie sauvage est si simple, et nos sociĂ©tĂ©s sont des machines si compliquĂ©es ! Le TaĂŻtien touche Ă lâoriginedu monde, et lâEuropĂ©en touche Ă sa vieillesse. Lâintervalle qui le sĂ©pare de nous est plus grand que la distance de lâenfant qui naĂźt Ă lâhomme dĂ©crĂ©pit. Il nâentend rien Ă nos usages, Ă nos lois, ou il nây voit que des entraves dĂ©guisĂ©es sous cent formes diverses ;entraves qui ne peuvent quâexciter lâindignation et le mĂ©pris dâun ĂȘtre en qui le sentiment de la libertĂ© est le plus profond Est-ce que vous donneriez dans la fable de TaĂŻti ?B. Ce nâest point une fable ; et vous nâauriez aucun doute sur la sincĂ©ritĂ© de Bougainville, si vous connaissiez le supplĂ©ment de Et oĂč trouve-t-on ce supplĂ©ment ?B. LĂ , sur cette table. A. Est-ce que vous ne me le confierez pas ?B. Non ; mais nous pourrons le parcourir ensemble, si vous AssurĂ©ment, je le veux. VoilĂ le brouillard qui retombe, et lâazur du ciel qui commence Ă paraĂźtre. Il semble que mon lot soit dâavoirtort avec vous jusque dans les moindres choses ; il faut que je sois bien bon pour vous pardonner une supĂ©rioritĂ© aussi continue !B. Tenez, tenez, lisez passez ce prĂ©ambule qui ne signifie rien, et allez droit aux adieux que lit un des chefs de lâĂźle Ă nos vous donnera quelque notion de lâĂ©loquence de ces Comment Bougainville a-t-il compris ces adieux prononcĂ©s dans un langue quâil ignorait ?B. Vous le saurez. Câest un vieillard qui parle..IILES ADIEUX DU Ă©tait pĂšre dâune famille nombreuse. Ă lâarrivĂ©e des EuropĂ©ens, il laissa tomber des regards de dĂ©dain sur eux, sans marquer niĂ©tonnement, ni frayeur, ni curiositĂ© [1]. Ils lâabordĂšrent ; il leur tourna le dos, se retira dans sa cabane. Son silence et son souci nedĂ©celaient que trop sa pensĂ©e il gĂ©missait en lui-mĂȘme sur les beaux jours de son pays Ă©clipsĂ©s. Au dĂ©part de Bougainville, lorsqueles habitants accouraient en foule sur le rivage, sâattachaient Ă ses vĂȘtements, serraient ses camarades entre leurs bras, etpleuraient, ce vieillard sâavança dâun air sĂ©vĂšre, et dit Pleurez, malheureux TaĂŻtiens ! pleurez ; mais que ce soit de lâarrivĂ©e, et non du dĂ©part de ces hommes ambitieux et mĂ©chants unjour, vous les connaĂźtrez mieux. Un jour, ils reviendront, le morceau de bois que vous voyez attachĂ© Ă la ceinture de celui-ci, dans unemain, et le fer qui pend au cĂŽtĂ© de celui-lĂ , dans lâautre, vous enchaĂźner, vous Ă©gorger, ou vous assujettir Ă leurs extravagances et Ă leurs vices ; un jour vous servirez sous eux, aussi corrompus, aussi vils, aussi malheureux quâeux. Mais je me console ; je touche Ă lafin de ma carriĂšre ; et la calamitĂ© que je vous annonce, je ne la verrai point. TaĂŻtiens ! mes amis ! vous auriez un moyen dâĂ©chapper Ă un funeste avenir ; mais jâaimerais mieux mourir que de vous en donner le conseil. Quâils sâĂ©loignent, et quâils vivent. »Puis sâadressant Ă Bougainville, il ajouta Et toi, chef des brigands qui tâobĂ©issent, Ă©carte promptement ton vaisseau de notre rive nous sommes innocents, nous sommes heureux ; et tu ne peux que nuire Ă notre bonheur. Nous suivons le pur instinct de la nature ; ettu as tentĂ© dâeffacer de nos Ăąmes son caractĂšre. Ici tout est Ă tous ; et tu nous as prĂȘchĂ© je ne sais quelle distinction du tien et dumien. Nos filles et nos femmes nous sont communes ; tu as partagĂ© ce privilĂšge avec nous ; et tu es venu allumer en elles des fureursinconnues. Elles sont devenues folles dans tes bras ; tu es devenu fĂ©roce entre les leurs. Elles ont commencĂ© Ă se haĂŻr ; vous vousĂȘtes Ă©gorgĂ©s pour elles ; et elles nous sont revenues teintes de votre sang. Nous sommes libres ; et voilĂ que tu as enfoui dans notreterre le titre de notre futur esclavage. Tu nâes ni un dieu, ni un dĂ©mon qui es-tu donc, pour faire des esclaves ? Orou ! toi qui entendsla langue de ces hommes-LĂ , dis-nous Ă tous, comme tu me lâas dit Ă moi, ce quâils ont Ă©crit sur cette lame de mĂ©tal Ce pays est Ă nous. Ce pays est Ă toi ! et pourquoi ? parce que tu y as mis le pied ? Si un TaĂŻtien dĂ©barquait un jour sur vos cĂŽtes, et quâil gravĂąt surune de vos pierres ou sur lâĂ©corce dâun de vos arbres Ce pays appartient aux habitants de TaĂŻti, quâen penserais-tu ? Tu es le plusfort ! Et quâest-ce que cela fait ? Lorsquâon tâa enlevĂ© une des mĂ©prisables bagatelles dont ton bĂątiment est rempli, tu tâes rĂ©criĂ©, tutâes vengĂ© ; et dans le mĂȘme instant tu as projetĂ© au fond de ton cĆur le vol de toute une contrĂ©e ! Tu nâes pas esclave tu souffriraisla mort plutĂŽt que de lâĂȘtre, et tu veux nous asservir ! Tu crois donc que le TaĂŻtien ne sait pas dĂ©fendre sa libertĂ© et mourir ? Celui donttu veux tâemparer comme de la brute, le TaĂŻtien est ton frĂšre. Vous ĂȘtes deux enfants de la nature ; quel droit as-tu sur lui quâil nâait passur toi ? Tu es venu ; nous sommes-nous jetĂ©s sur ta personne ? avons-nous pillĂ© ton vaisseau ? tâavons-nous saisi et exposĂ© auxflĂšches de nos ennemis ? tâavons-nous associĂ© dans nos champs au travail de nos animaux ? Nous avons respectĂ© notre image entoi. Laisse-nous nos mĆurs, elles sont plus sages et plus honnĂȘtes que les tiennes. Nous ne voulons point troquer ce que tu appellesnotre ignorance contre tes inutiles lumiĂšres. Tout ce qui nous est nĂ©cessaire et bon, nous le possĂ©dons. Sommes-nous dignes demĂ©pris parce que nous nâavons pas su nous faire des besoins superflus ? Lorsque nous avons faim, nous avons de quoi manger ;lorsque nous avons froid, nous avons de quoi nous vĂȘtir. Tu es entrĂ© dans nos cabanes, quây manque-t-il, Ă ton avis ? PoursuisjusquâoĂč tu voudras ce que tu appelles commoditĂ©s de la vie ; mais permets Ă des ĂȘtres sensĂ©s de sâarrĂȘter, lorsquâils nâauraient Ă obtenir, de la continuitĂ© de leurs pĂ©nibles efforts, que des biens imaginaires. Si tu nous persuades de franchir lâĂ©troite limite dubesoin, quand finirons-nous de travailler ? Quand jouirons-nous ? Nous avons rendu la somme de nos fatigues annuelles etjournaliĂšres, la moindre quâil Ă©tait possible, parce que rien ne nous paraĂźt prĂ©fĂ©rable au repos. Va dans ta contrĂ©e tâagiter, tetourmenter tant que tu voudras ; laisse-nous reposer ne nous entĂȘte ni de tes besoins factices, ni de tes vertus ces hommes ; vois comme ils sont droits, sains et robustes Regarde ces femmes ; vois comme elles sont droites, saines,fraĂźches et belles. Prends cet arc, câest le mien ; appelle Ă ton aide un, deux, trois, quatre de tes camarades, et tĂąchez de le tendre. Jele tends moi seul ; je laboure la terre ; je grimpe la montagne ; je perce la forĂȘt ; je parcours une lieue de la plaine en moins dâuneheure. Tes jeunes compagnons ont eu peine Ă me suivre, et jâai quatre-vingt-dix ans passĂ©s. Malheur Ă cette Ăźle ! malheur aux TaĂŻtiensprĂ©sents, et Ă tous les TaĂŻtiens Ă venir, du jour oĂč tu nous as visitĂ©s ! Nous ne connaissions quâune maladie, celle Ă laquelle lâhomme,lâanimal et la plante ont Ă©tĂ© condamnĂ©s, la vieillesse, et tu nous en as apportĂ© une autre ; tu as infectĂ© notre sang. Il nous faudra peut-ĂȘtre exterminer de nos propres mains nos filles, nos femmes, nos enfants ; ceux qui ont approchĂ© tes femmes ; celles qui ontapprochĂ© tes hommes. Nos champs seront trempĂ©s du sang impur qui a passĂ© de tes veines dans les nĂŽtres ; ou nos enfants,condamnĂ©s Ă nourrir et Ă perpĂ©tuer le mal que tu as donnĂ© aux pĂšres et aux mĂšres et quâils transmettront Ă jamais Ă leursdescendants. Malheureux ! tu seras coupable, ou des ravages qui suivront les funestes caresses des tiens, ou des meurtres que nouscommettrons pour en arrĂȘter le poison. Tu parles de crimes ! as-tu lâidĂ©e dâun plus grand crime que le tien ? Quel est chez toi lechĂątiment de celui qui tue son voisin ? la mort par le fer quel est chez toi le chĂątiment du lĂąche qui lâempoisonne ? la mort par le feu compare ton forfait Ă ce dernier ; et dis-nous, empoisonneur de nations, le supplice que tu mĂ©rites ? Il nây a quâun moment, la jeuneTaĂŻtienne sâabandonnait aux transports, aux embrassements du jeune TaĂŻtien ; attendait avec impatience que sa mĂšre autorisĂ©e parlâĂąge nubile relevĂąt son voile, et mĂźt sa gorge Ă nu. Elle Ă©tait fiĂšre dâexciter les dĂ©sirs, et dâarrĂȘter les regards amoureux de lâinconnu,de ses parents, de son frĂšre ; elle acceptait sans frayeur et sans honte, en notre prĂ©sence, au milieu dâun cercle dâinnocents TaĂŻtiens,au son des flĂ»tes, entre les danses, les caresses de celui que son jeune cĆur et la voix secrĂšte de ses sens lui dĂ©signaient. LâidĂ©e decrime et le pĂ©ril de la maladie sont entrĂ©s avec toi parmi nous. Nos jouissances, autrefois si douces, sont accompagnĂ©es de remordset dâeffroi. Cet homme noir, qui est prĂšs de toi, qui mâĂ©coute, a parlĂ© Ă nos garçons ; je ne sais ce quâil a dit Ă nos filles ; mais nosgarçons hĂ©sitent ; mais nos filles rougissent. Enfonce-toi, si tu veux, dans la forĂȘt obscure avec la compagne perverse de tes plaisirs ;mais accorde aux bons et simples TaĂŻtiens de se reproduire sans honte, Ă la face du ciel et au grand jour. Quel sentiment plushonnĂȘte et plus grand pourrais-tu mettre Ă la place de celui que nous leur avons inspirĂ©, et qui les anime ? Ils pensent que le momentdâenrichir la nation et la famille dâun nouveau citoyen est venu, et ils sâen glorifient. Ils mangent pour vivre et pour croĂźtre ils croissentpour multiplier, et ils nây trouvent ni vice, ni honte. Ăcoute la suite de tes forfaits. Ă peine tâes-tu montrĂ© parmi eux, quâils sont devenusvoleurs. Ă peine es-tu descendu dans notre terre, quâelle a fumĂ© de sang. Ce TaĂŻtien qui courut Ă ta rencontre, qui tâaccueillit, qui tereçut en criant TaĂŻo ! ami, ami ; vous lâavez tuĂ©. Et pourquoi lâavez-vous tuĂ© ? parce quâil avait Ă©tĂ© sĂ©duit par lâĂ©clat de tes petits Ćufsde serpents [2]. Il te donnait ses fruits ; il tâoffrait sa femme et sa fille ; il te cĂ©dait sa cabane et tu lâas tuĂ© pour une poignĂ©e de cesgrains, quâil avait pris sans te le demander [3]. Et ce peuple ? Au bruit de ton arme meurtriĂšre, la terreur sâest emparĂ©e de lui ; et ilsâest enfui dans la montagne. Mais crois quâil nâaurait pas tardĂ© dâen descendre ; crois quâen un instant, sans moi, nous pĂ©rissieztous. Eh ! pourquoi les ai-je apaisĂ©s ? pourquoi les ai-je contenus ? pourquoi les contiens-je encore dans ce moment ? Je lâignore ;car tu ne mĂ©rites aucun sentiment de pitiĂ© ; car tu as une Ăąme fĂ©roce qui ne lâĂ©prouva jamais. Tu tâes promenĂ©, toi et les liens, dansnotre Ăźle ; tu as Ă©tĂ© respectĂ© ; tu as joui de tout ; tu nâas trouvĂ© sur ton chemin ni barriĂšre, ni refus on tâinvitait ; tu tâasseyais ; on Ă©talaitdevant toi lâabondance du pays. As-tu voulu des jeunes filles ? exceptĂ© celles qui nâont pas encore le privilĂšge de montrer leur visageet leur gorge, les mĂšres tâont prĂ©sentĂ© les autres toutes nues ; te voilĂ possesseur de la tendre victime du devoir hospitalier ; on ajonchĂ©, pour elle et pour toi, la terre de feuilles et de fleurs ; les musiciens ont accordĂ© leurs instruments ; rien nâa troublĂ© la douceur, nigĂȘnĂ© la libertĂ© de tes caresses ni des siennes. On a chantĂ© lâhymne, lâhymne qui tâexhortait Ă ĂȘtre homme, qui exhortait notre enfant Ă ĂȘtre femme, et femme complaisante et voluptueuse. On a dansĂ© autour de votre couche ; et câest au sortir des bras de cette femme,aprĂšs avoir Ă©prouvĂ© sur son sein la plus douce ivresse, que tu as tuĂ© son frĂšre, son ami, son pĂšre, peut-ĂȘtre. Tu as fait pis encore ;regarde de ce cĂŽtĂ© ; vois cette enceinte hĂ©rissĂ©e de flĂšches [4]; ces armes qui nâavaient menacĂ© que nos ennemis, vois-les tournĂ©escontre nos propres enfants vois les malheureuses compagnes de nos plaisirs ; vois leur tristesse ; vois la douleur de leurs pĂšres ;vois le dĂ©sespoir de leurs mĂšres câest lĂ quâelles sont condamnĂ©es Ă pĂ©rir par nos mains, ou par le mal que tu leur as Ă moins que tes yeux cruels ne se plaisent Ă des spectacles de mort Ă©loigne-toi ; va, et puissent les mers coupables quitâont Ă©pargnĂ© dans ton voyage, sâabsoudre, et nous venger en tâengloutissant avant ton retour ! Et vous, TaĂŻtiens, rentrez dans voscabanes, rentrez tous ; et que ces indignes Ă©trangers nâentendent Ă leur dĂ©part que le flot qui mugit, et ne voient que lâĂ©cume dont safureur blanchit une rive dĂ©serte ! Ȉ peine eut-il achevĂ©, que la foule des habitants disparut un vaste silence rĂ©gna dans toute lâĂ©tendue de lâĂźle ; et lâon nâentendit que le sifflement aigu des vents et le bruit sourd des eaux sur toute la longueur de la cĂŽte on eĂ»t dit que lâair et la mer, sensibles Ă la voix duvieillard, se disposaient Ă lui Eh bien ! quâen pensez-vous ?A. Ce discours me paraĂźt vĂ©hĂ©ment ; mais Ă travers je ne sais quoi dâabrupt et de sauvage, il me semble y retrouver des idĂ©es et destournures Pensez donc que câest une traduction du taĂŻtien en espagnol, et de lâespagnol en français. Le vieillard sâĂ©tait rendu, la nuit, chez cetOrou quâil a interpellĂ©, et dans la case duquel lâusage de la langue espagnole sâĂ©tait conservĂ© de temps immĂ©morial [5]. Orou avaitĂ©crit en espagnol la harangue du vieillard et Bougainville en avait une copie Ă la main, tandis que le TaĂŻtien la Je ne vois que trop Ă prĂ©sent pourquoi Bougainville a supprimĂ© ce fragment ; mais ce nâest pas lĂ tout ; et ma curiositĂ© pour lereste nâest pas Ce qui suit, peut-ĂȘtre, vous intĂ©ressera Nâ Câest un entretien de lâaumĂŽnier de lâĂ©quipage avec un habitant de lâ Orou ?B. Lui-mĂȘme. Lorsque le vaisseau de Bougainville approcha de TaĂŻti, un nombre infini dâarbres creusĂ©s furent lancĂ©s sur les eaux ; enun instant son bĂątiment en fut environnĂ© ; de quelque cĂŽtĂ© quâil tournĂąt ses regards, il voyait des dĂ©monstrations de surprise et debienveillance. On lui jetait des provisions ; on lui tendait Les bras ; on sâattachait Ă des cordes ; on gravissait contre des planches onavait rempli sa chaloupe ; on criait vers le rivage, dâoĂč les cris Ă©taient rĂ©pondus ; les habitants de lâĂźle accouraient ; les voilĂ tous Ă terre on sâempare des hommes de lâĂ©quipage ; on se les partage ; chacun conduit le sien dans sa cabane les hommes les tenaientembrassĂ©s par le milieu du corps ; les femmes leur flattaient les joues de leurs mains. Placez-vous lĂ ; soyez tĂ©moin, par la pensĂ©e,de ce spectacle dâhospitalitĂ© ; et dites-moi comment vous trouvez lâespĂšce Mais jâoublierais peut-ĂȘtre de vous parler dâun Ă©vĂ©nement assez singulier. Cette scĂšne de bienveillance et dâhumanitĂ© fut troublĂ©etout Ă coup par les cris dâun homme qui appelait Ă son secours ; câĂ©tait le domestique dâun des officiers de Bougainville. De jeunesTaĂŻtiens sâĂ©taient jetĂ©s sur lui, lâavaient Ă©tendu par terre, le dĂ©shabillaient et se disposaient Ă lui faire la Quoi ! ces peuples si simples, ces sauvages si bons, si honnĂȘtes ?âŠB. Vous vous trompez ; ce domestique Ă©tait une femme dĂ©guisĂ©e en homme. IgnorĂ©e de lâĂ©quipage entier, pendant tout le tempsdâune longue traversĂ©e, les TaĂŻtiens devinĂšrent son sexe au premier coup dâĆil. Elle Ă©tait nĂ©e en Bourgogne ; elle sâappelait BarrĂ© ; nilaide, ni jolie, ĂągĂ©e de vingt-six ans. Elle nâĂ©tait jamais sortie de son hameau ; et sa premiĂšre pensĂ©e de voyager fut de faire le tourdu globe elle montra toujours de la sagesse et du Ces frĂȘles machines-lĂ renferment quelquefois des Ăąmes bien fortes..IIIENTRETIEN DE LâAUMĂNIER ET Dâ Dans la division que les TaĂŻtiens se firent de lâĂ©quipage de Bougainville, lâaumĂŽnier [6] devint le partage dâOrou. LâaumĂŽnier et leTaĂŻtien Ă©taient Ă peu prĂšs du mĂȘme Ăąge, trente-cinq Ă trente-six ans. Orou nâavait alors que sa femme et trois filles appelĂ©es Asto,Palli et Thia. Elles le dĂ©shabillĂšrent, lui lavĂšrent le visage, les mains et les pieds, et lui servirent un repas sain et frugal. Lorsquâil fut surle point de se coucher, Orou, qui sâĂ©tait absentĂ© avec sa famille, reparut, lui prĂ©senta sa femme et ses trois filles nues, et lui dit â Tu as soupe, tu es jeune, tu te portes bien ; si tu dors seul, tu dormiras mal ; lâhomme a besoin la nuit dâune compagne Ă son ma femme, voilĂ mes filles choisis celle qui te convient ; mais si tu veux mâobliger, tu donneras la prĂ©fĂ©rence Ă la plus jeune demes filles qui nâa point encore eu dâ mĂšre ajouta â HĂ©las! je nâai point Ă mâen plaindre ; la pauvre Thia ! ce nâest pas sa rĂ©pondit Que sa religion, son Ă©tat, les bonnes mĆurs et lâhonnĂȘtetĂ© ne lui permettaient pas dâaccepter ces rĂ©pliqua â Je ne sais ce que câest que la chose que tu appelles religion ; mais je ne puis quâen penser mal, puisquâelle tâempĂȘche de goĂ»terun plaisir innocent, auquel nature, la souveraine maĂźtresse, nous invite tous ; de donner lâexistence Ă un de tes semblables ; de rendre un plaisir innocent, auquel nature, la souveraine maĂźtresse, nous invite tous ; de donner lâexistence Ă un de tes semblables ; de rendreun service que le pĂšre, la mĂšre et les enfants te demandent ; de tâacquitter avec un hĂŽte qui tâa fait un bon accueil, et dâenrichir unenation, en lâaccroissant dâun sujet de plus. Je ne sais ce que câest que la chose que tu appelles Ă©tat ; mais ton premier devoir estdâĂȘtre homme et dâĂȘtre reconnaissant. Je ne te propose point de porter dans ton pays les mĆurs dâOrou ; mais Orou, ton hĂŽte et tonami, te supplie de te prĂȘter aux mĆurs de TaĂŻti. Les mĆurs de TaĂŻti sont-elles meilleures ou plus mauvaises que les vĂŽtres ? câestune question facile Ă dĂ©cider. La terre oĂč tu es nĂ© a-t-elle plus dâhommes quâelle nâen peut nourrir ? en ce cas tes mĆurs ne sont nipires, ni meilleures que les nĂŽtres. En peut-elle nourrir plus quâelle nâen a ? nos mĆurs sont meilleures que les tiennes. Quant Ă lâhonnĂȘtetĂ© que tu mâobjectes, je te comprends ; jâavoue que jâai tort ; et je tâen demande pardon. Je nâexige pas que tu nuises Ă tasantĂ© ; si tu es fatiguĂ©, il faut que tu te reposes ; mais jâespĂšre que tu ne continueras pas Ă nous contrister. Vois le souci que tu asrĂ©pandu sur tous ces visages elles craignent que tu nâaies remarquĂ© en elles quelques dĂ©fauts qui leur attirent ton dĂ©dain. Maisquand cela serait, le plaisir dâhonorer une de mes filles, entre ses compagnes et ses sĆurs, et de faire une bonne action, ne tesuffirait-il pas ? Sois gĂ©nĂ©reux !lâ nâest pas cela elles sont toutes quatre Ă©galement belles ; mais ma religion ! mais mon Ă©tat !.uoroElles mâappartiennent, et je te les offre elles sont Ă elles, et elles se donnent Ă toi. Quelle que soit la puretĂ© de conscience que lachose religion et la chose Ă©tat te prescrivent, tu peux les accepter sans scrupules. Je nâabuse point de mon autoritĂ© ; et sois sĂ»r queje connais et que je respecte les droits des le vĂ©ridique aumĂŽnier convient que jamais la Providence ne lâavait exposĂ© Ă une aussi pressante tentation. Il Ă©tait jeune ; ilsâagitait, il se tourmentait ; il dĂ©tournait ses regards des aimables suppliantes ; il les ramenait sur elles ; il levait ses mains et ses yeuxau ciel. â Thia, la plus jeune, embrassait ses genoux et lui disait Ătranger, nâafflige pas mon pĂšre, nâafflige pas ma mĂšre, nemâafflige pas ! Honore-moi dans la cabane et parmi les miens ; Ă©lĂšve-moi au rang de mes sĆurs qui se moquent de moi. Asto lâaĂźnĂ©ea dĂ©jĂ trois enfants ; Palli, la seconde, en a deux, et Thia nâen a point ! Ătranger, honnĂȘte Ă©tranger, ne me rebute pas ! rends-moimĂšre ; fais-moi un enfant que je puisse un jour promener par la main, Ă cĂŽtĂ© de moi, dans TaĂŻti ; quâon voie dans neuf mois attachĂ© Ă mon sein ; dont je sois fiĂšre, et qui fasse une partie de ma dot, lorsque je passerai de la cabane de mon pĂšre dans une autre. Jeserai peut-ĂȘtre plus chanceuse avec toi quâavec nos jeunes TaĂŻtiens. Si tu mâaccordes cette faveur, je ne tâoublierai plus ; je te bĂ©niraitoute ma vie ; jâĂ©crirai ton nom sur mon bras et sur celui de ton fils ; nous le prononcerons sans cesse avec joie ; et, lorsque tuquitteras ce rivage, mes souhaits tâaccompagneront sur les mers jusquâĂ ce que tu sois arrivĂ© dans ton naĂŻf aumĂŽnier dit quâelle lui serrait les mains, quâelle attachait sur ses yeux des regards si expressifs et si touchants ; quâellepleurait ; que son pĂšre, sa mĂšre et ses sĆurs sâĂ©loignĂšrent ; quâil resta seul avec elle, et quâen disant Mais ma religion, mais monĂ©tat, il se trouva le lendemain couchĂ© Ă cĂŽtĂ© de cette jeune fille, qui lâaccablait de caresses, et qui invitait son pĂšre, sa mĂšre et sessĆurs, lorsquâils sâapprochĂšrent de leur lit le matin, Ă joindre leur reconnaissance Ă la et Palli, qui sâĂ©taient Ă©loignĂ©es, rentrĂšrent avec les mets du pays, des boissons et des fruits elles embrassaient leur sĆur etfaisaient des vĆux sur elle. Ils dĂ©jeunĂšrent tous ensemble ; ensuite Orou, demeurĂ© seul avec lâaumĂŽnier, lui dit â Je vois que ma fille est contente de toi ; et je te remercie. Mais pourrais-tu mâapprendre ce que câest que le mot religion, que tu asrĂ©pĂ©tĂ© tant de fois, et avec tant de douleur ?LâaumĂŽnier, aprĂšs avoir rĂȘvĂ© un moment, rĂ©pondit â Qui est-ce qui a fait ta cabane et les ustensiles qui la meublent ?.uoroCâest bien ! nous croyons que ce monde et ce quâil renferme est lâouvrage dâun a donc des pieds, des mains, une tĂȘte ?.noNOĂč fait-il sa demeure ? mĂȘme !lâ lâaumĂŽnier..uorolâaumĂŽnier..icINous ne lâavons jamais ne le voit pas..uoroVoilĂ un pĂšre bien indiffĂ©rent ! Il doit ĂȘtre vieux ; car il a au moins lâĂąge de son ouvrage. lâ ne vieillit point il a parlĂ© Ă nos ancĂȘtres il leur a donnĂ© des lois ; il leur a prescrit la maniĂšre dont il voulait ĂȘtre honorĂ© ; il leur aordonnĂ© certaines actions, comme bonnes ; il leur en a dĂ©fendu dâautres, comme mauvaises..uoroJâentends ; et une de ces actions quâil leur a dĂ©fendues comme mauvaises, câest de coucher avec une femme et une fille ? Pourquoidonc a-t-il fait deux sexes ?lâ sâunir ; mais Ă certaines conditions requises, aprĂšs certaines cĂ©rĂ©monies prĂ©alables, en consĂ©quence desquelles un hommeappartient Ă une femme, et nâappartient quâĂ elle ; une femme appartient Ă un homme, et nâappartient quâĂ lui..uoroPour toute leur vie ?Pour toute leur vie..uoroEn sorte que, sâil arrivait Ă une femme de coucher avec un autre que son mari, ou Ă un mari de coucher avec une autre que safemme⊠mais cela nâarrive point, car, puisquâil est lĂ , et que cela lui dĂ©plaĂźt, il sait les en ; il les laisse faire, et ils pĂšchent contre la loi de Dieu car câest ainsi que nous appelons le grand ouvrier, contre la loi du pays ; etils commettent un serais fĂąchĂ© de tâoffenser par mes discours ; mais si tu le permettais, je te dirais mon prĂ©ceptes singuliers, je les trouve opposĂ©s Ă la nature, et contraires Ă la raison ; faits pour multiplier les crimes, et fĂącher Ă toutmoment le vieil ouvrier, qui a tout fait sans mains, sans tĂȘte et sans outils ; qui est partout, et quâon ne voit nulle part ; qui dureaujourdâhui et demain, et qui nâa pas un jour de plus ; qui commande et qui nâest pas obĂ©i ; qui peut empĂȘcher, et qui nâempĂȘche Ă la nature, parce quâils supposent quâun ĂȘtre pensant, sentant et libre, peut ĂȘtre la propriĂ©tĂ© dâun ĂȘtre semblable Ă lui. Surquoi ce droit serait-il fondĂ© ? Ne vois-tu pas quâon a confondu, dans ton pays, la chose qui nâa ni sensibilitĂ©, ni pensĂ©e, ni dĂ©sir, nivolontĂ© ; quâon quitte, quâon prend, quâon garde, quâon Ă©change sans quâelle souffre et sans quâelle se plaigne, avec la chose qui nesâĂ©change point, ne sâacquiert point ; qui a libertĂ©, volontĂ©, dĂ©sir ; qui peut se donner ou se refuser pour un moment ; se donner ou serefuser pour toujours ; qui se plaint et qui souffre ; et qui ne saurait devenir un effet de commerce, sans quâon oublie son caractĂšre, etquâon fasse violence Ă la nature ? Contraires Ă la loi gĂ©nĂ©rale des ĂȘtres. Rien, en effet, te paraĂźt-il plus insensĂ© quâun prĂ©cepte quiproscrit le changement qui est en nous ; qui commande une constance qui nây peut ĂȘtre, et qui viole la libertĂ© du mĂąle et de la femelle,en les enchaĂźnant pour jamais lâun Ă lâautre ; quâune fidĂ©litĂ© qui borne la plus capricieuse des jouissances Ă un mĂȘme individu ; quâunserment dâimmutabilitĂ© de deux ĂȘtres de chair, Ă la face dâun ciel qui nâest pas un instant le mĂȘme, sous des antres qui menacentruine ; au bas dâune roche qui tombe en poudre ; au pied dâun arbre qui se gerce ; sur une pierre qui sâĂ©branle ? Crois-moi, vous avezrendu la condition de lâhomme pire que celle de lâanimal. Je ne sais ce que câest que ton grand ouvrier mais je me rĂ©jouis quâil nâaitpoint parlĂ© Ă nos pĂšres, et je souhaite quâil ne parle point Ă nos enfants ; car il pourrait par hasard leur dire les mĂȘmes sottises, et ilsferaient peut-ĂȘtre celle de le croire. Hier, en soupant, tu nous as entretenus de magistrats et de prĂȘtres ; je ne sais quels sont ces personnages que tu appelles magistrats et prĂȘtres, dont lâautoritĂ© rĂšgle votre conduite ; mais, dis-moi, sont-ils maĂźtres du bien et dumal ? Peuvent-ils faire que ce qui est juste soit injuste, et que ce qui est injuste soit juste ? dĂ©pend-il dâeux dâattacher le bien Ă desactions nuisibles, et le mal Ă des actions innocentes ou utiles ? Tu ne saurais le penser, car, Ă ce compte, il nây aurait ni vrai ni faux, nibon ni mauvais, ni beau ni laid ; du moins, que ce quâil plairait Ă ton grand ouvrier, Ă les magistrats, Ă tes prĂȘtres, de prononcer tel ; et,dâun moment Ă , lâautre, tu serais obligĂ© de changer dâidĂ©es et de conduite. Un jour lâon te dirait, de la part de lâun de tes trois maĂźtres tue, et tu serais obligĂ©, en conscience, de tuer ; un autre jour vole ; et tu serais tenu de voler ; ou ne mange pas de ce fruit ; et tunâoserais en manger ; je te dĂ©fends ce lĂ©gume ou cet animal ; et tu te garderais dây toucher. Il nây a point de bontĂ© quâon ne pĂ»ttâinterdire ; point de mĂ©chancetĂ© quâon ne pĂ»t tâordonner. Et oĂč en serais-tu rĂ©duit, si tes trois maĂźtres, peu dâaccord entre eux,sâavisaient de te permettre, de tâenjoindre et de te dĂ©fendre la mĂȘme chose, comme je pense quâil arrive souvent ? Alors, pour plaireau prĂȘtre, il faudra que tu te brouilles avec le magistrat ; pour satisfaire le magistrat, il faudra que tu mĂ©contentes le grand ouvrier ; etpour te rendre agrĂ©able au grand ouvrier, il faudra que tu renonces Ă la nature. Et sais-tu ce qui en arrivera? câest que tu lesmĂ©priseras tous trois, et que tu ne seras ni homme, ni citoyen, ni pieux ; que tu ne seras rien ; que tu seras mal avec toutes les sortesdâautoritĂ©s ; mal avec toi-mĂȘme ; mĂ©chant, tourmentĂ© par ton cĆur ; persĂ©cutĂ© par tes maĂźtres insensĂ©s ; et malheureux, comme je tevis hier au soir, lorsque je te prĂ©sentai mes filles et ma femme, et que tu tâĂ©criais Mais ma religion ! mais mon Ă©tat ! Veux-tu savoir,en tous temps et en tous lieux, ce qui est bon et mauvais ? Attache-toi Ă la nature des choses et des actions ; Ă tes rapports avec tonsemblable ; Ă lâinfluence de ta conduite sur ton utilitĂ© particuliĂšre et le bien gĂ©nĂ©ral. Tu es en dĂ©lire, si tu crois quâil y ait rien, soit enhaut, soit en bas, dans lâunivers, qui puisse ajouter ou retrancher aux lois de la nature. Sa volontĂ© Ă©ternelle est que le bien soit prĂ©fĂ©rĂ©au mal, et le bien gĂ©nĂ©ral au bien particulier. Tu ordonneras le contraire ; mais tu ne seras pas obĂ©i. Tu multiplieras les malfaiteurs etles malheureux par la crainte, par les chĂątiments et par les remords tu dĂ©praveras les consciences ; tu corrompras les esprits ; ils nesauront plus ce quâils ont Ă faire ou Ă Ă©viter. TroublĂ©s dans lâĂ©tat dâinnocence, tranquilles dans le forfait, ils auront perdu lâĂ©toile polairedans leur chemin. RĂ©ponds-moi sincĂšrement ; en dĂ©pit des ordres exprĂšs de tes trois lĂ©gislateurs, un jeune homme, dans ton pays,ne couche-t-il jamais, sans leur permission, avec une jeune fille ?lâ mentirais si je te lâassurais. .uoroLa femme, qui a jurĂ© de nâappartenir quâĂ son mari, ne se donne-t-elle point Ă un autre ?lâ de plus commun..uoroTes lĂ©gislateurs sĂ©vissent ou ne sĂ©vissent pas sâils sĂ©vissent, ce sont des bĂȘtes fĂ©roces qui battent la nature ; sâils ne sĂ©vissent pas,ce sont des imbĂ©ciles qui ont exposĂ© au mĂ©pris leur autoritĂ© par une dĂ©fense coupables, qui Ă©chappent Ă la sĂ©vĂ©ritĂ© des lois, sont chĂątiĂ©s par le blĂąme gĂ©nĂ©ral..uoroCâest-Ă -dire que la justice sâexerce par le dĂ©faut de sens commun de toute la nation ; et que câest la folie de lâopinion qui supplĂ©e fille dĂ©shonorĂ©e ne trouve plus de ! et pourquoi ?La femme infidĂšle est plus ou moins ! et pourquoi ?Le jeune homme sâappelle un lĂąche lĂąche ! un sĂ©ducteur ! et pourquoi ?lâaumĂŽnier..uorolâaumĂŽnier..uorolâ lâaumĂŽnier..uorolâ pĂšre, la mĂšre et lâenfant sont dĂ©solĂ©s. LâĂ©poux volage est un libertin lâĂ©poux trahi partage la honte de sa femme..uoroQuel monstrueux tissu dâextravagances tu mâexposes lĂ ! et encore tu ne dis pas tout car aussitĂŽt quâon sâest permis de disposer Ă son grĂ© des idĂ©es de justice et de propriĂ©tĂ© ; dâĂŽter ou de donner un caractĂšre arbitraire aux choses ; dâunir aux actions ou dâensĂ©parer le bien et le mal, sans consulter que le caprice, on se blĂąme, on sâaccuse, on se suspecte, on se tyrannise, on est envieux, onest jaloux, on se trompe, on sâafflige, on se cache, on dissimule, on sâĂ©pie, on se surprend, on se querelle, on ment ; les filles enimposent Ă leurs parents ; les maris Ă leurs femmes ; les femmes Ă leurs maris ; des filles, oui, je nâen doute pas, des filles Ă©toufferontleurs enfants ; des pĂšres soupçonneux mĂ©priseront et nĂ©gligeront les leurs ; des mĂšres sâen sĂ©pareront et les abandonneront Ă lamerci du sort ; et le crime et la dĂ©bauche se montreront sous toutes sortes de formes. Je sais tout cela, comme si jâavais vĂ©cu parmivous. Cela est, parce que cela doit ĂȘtre ; et ta sociĂ©tĂ©, dont votre chef vous vante le bel ordre, ne sera quâun ramas dâhypocrites, quifoulent secrĂštement aux pieds les lois ; ou dâinfortunĂ©s, qui sont eux-mĂȘmes les instruments de leurs supplices, en sây soumettant ; oudâimbĂ©ciles, en qui le prĂ©jugĂ© a tout Ă fait Ă©touffĂ© la voix de la nature ; ou dâĂȘtres mal organisĂ©s, en qui la nature ne rĂ©clame pas ressemble. Mais vous ne vous mariez donc point ?Nous nous que votre mariage ?.uoroLe consentement dâhabiter une mĂȘme cabane, et de coucher dans le mĂȘme lit, tant que nous nous y trouverons lorsque vous vous y trouvez mal ?Nous nous deviennent vos enfants ?.uoroĂ Ă©tranger ! ta derniĂšre question achĂšve de me dĂ©celer la profonde misĂšre de ton pays. Sache, mon ami, quâici la naissance dâunenfant est toujours un bonheur, et sa mort un sujet de regrets et de larmes. Un enfant est un bien prĂ©cieux, parce quâil doit devenir unhomme ; aussi, en avons-nous un tout autre soin que de nos plantes et de nos animaux. Un enfant qui naĂźt, occasionne la joiedomestique et publique câest un accroissement de fortune pour la cabane, et de force pour la nation ce sont des bras et des mainsde plus dans TaĂŻti ; nous voyons en lui un agriculteur, un pĂȘcheur, un chasseur, un soldat, un Ă©poux, un pĂšre. En repassant de lacabane de son mari dans celle de ses parents, une femme emmĂšne avec elle les enfants quâelle avait apportĂ©s en dot on partageceux qui sont nĂ©s pendant la cohabitation commune ; et lâon compense, autant quâil est possible, les mĂąles par les femelles, en sortequâil reste Ă chacun Ă peu prĂšs un nombre Ă©gal de filles et de les enfants sont longtemps Ă charge avant que de rendre service..uoroNous destinons Ă leur entretien et Ă la subsistance des vieillards, une sixiĂšme partie de tous les fruits du pays ; ce tribut les suitpartout. Ainsi tu vois que plus la famille du TaĂŻtien est nombreuse, plus il est sixiĂšme partie !.uoroOui ; câest un moyen sĂ»r dâencourager la population, et dâintĂ©resser au respect de la vieillesse et Ă la conservation des Ă©poux se reprennent-ils quelquefois ?lâaumĂŽnier. .uoroTrĂšs-souvent ; cependant la durĂ©e la plus courte dâun mariage est dâune lune Ă lâ moins que la femme ne soit grosse ; alors la cohabitation est au moins de neuf mois ?.uoroTu te trompes ; la paternitĂ©, comme le tribut, suit lâenfant mâas parlĂ© dâenfants quâune femme apporte en dot Ă son mari. .uoroAssurĂ©ment. VoilĂ ma fille aĂźnĂ©e qui a trois enfants ; ils marchent ; ils sont sains ; ils sont beaux ; ils promettent dâĂȘtre forts lorsquâil luiprendra fantaisie de se marier, elle les emmĂšnera ; ils sont les siens son mari les recevra avec joie, et sa femme ne lui en serait queplus agrĂ©able, si elle Ă©tait enceinte dâun lui ?.uoroDe lui, ou dâun autre. Plus nos filles ont dâenfants, plus elles sont recherchĂ©es ; plus nos garçons sont vigoureux et forts, plus ils sontriches aussi, autant nous sommes attentifs Ă prĂ©server les unes des approches de lâhomme, les autres du commerce de la femme,avant lâĂąge de fĂ©conditĂ© ; autant nous les exhortons Ă produire, lorsque les garçons sont pubĂšres et les filles nubiles. Tu ne sauraiscroire lâimportance du service que tu auras rendu Ă ma fille Thia, si tu lui as fait un enfant. Sa mĂšre ne lui dira plus Ă chaque lune Mais, Thia, Ă quoi penses-tu donc ? Tu ne deviens point grosse ; tu as dix-neuf ans ; tu devrais avoir dĂ©jĂ deux enfants, et tu nâen aspoint. Quel est celui qui se chargera de toi ? Si tu perds ainsi tes jeunes ans, que feras-tu dans ta vieillesse ? Thia, il faut que tu aiesquelque dĂ©faut qui Ă©loigne de toi les hommes. Corrige-toi, mon enfant Ă ton Ăąge, jâavais Ă©tĂ© trois fois prĂ©cautions prenez-vous pour garder vos filles et vos garçons adolescents ?.uoroCâest lâobjet principal de lâĂ©ducation domestique et le point le plus important des mĆurs publiques. Nos garçons, jusquâĂ lâĂąge devingt-deux ans, deux ou trois ans au delĂ de la pubertĂ©, restent couverts dâune longue tunique, et les reins ceints dâune petite que dâĂȘtre nubiles, nos filles nâoseraient sortir sans un voile blanc. Ăter sa chaĂźne, lever son voile, sont des fautes qui secommettent rarement, parce que nous leur en apprenons de bonne heure les fĂącheuses consĂ©quences. Mais au moment oĂč le mĂąle apris toute sa force, oĂč les symptĂŽmes virils ont de la continuitĂ©, et oĂč lâeffusion frĂ©quente et la qualitĂ© de la liqueur sĂ©minale nousrassurent ; au moment oĂč la jeune fille se fane, sâennuie, est dâune maturitĂ© propre Ă concevoir des dĂ©sirs, Ă en inspirer et Ă lessatisfaire avec utilitĂ©, le pĂšre dĂ©tache la chaĂźne Ă son fils et lui coupe lâongle du doigt du milieu de la main droite. La mĂšre relĂšve levoile de sa fille. Lâun peut solliciter une femme, et en ĂȘtre sollicitĂ© ; lâautre, se promener publiquement le visage dĂ©couvert et la gorgenue, accepter ou refuser les caresses dâun homme. On indique seulement dâavance, au garçon les filles, Ă la fille les garçons, quâilsdoivent prĂ©fĂ©rer. Câest une grande fĂȘte que le jour de lâĂ©mancipation dâune fille ou dâun garçon. Si câest une fille, la veille, les jeunesgarçons se rassemblent autour de la cabane, et lâair retentit pendant toute la nuit du chant des voix et du son des instruments. Le jour,elle est conduite par son pĂšre et par sa mĂšre dans une enceinte oĂč lâon danse et oĂč lâon fait lâexercice du saut, de la lutte et de lacourse. On dĂ©ploie lâhomme nu devant elle, sous toutes les faces et dans toutes les attitudes. Si câest un garçon, ce sont les jeunesfilles qui font en sa prĂ©sence les frais et les honneurs de la fĂȘte et exposent Ă ses regards la femme nue, sans rĂ©serve et sans reste de la cĂ©rĂ©monie sâachĂšve sur un lit de feuilles, comme tu lâas vu Ă ta descente parmi nous. Ă la chute du jour, la fille rentredans la cabane de ses parents, ou passe dans la cabane de celui dont elle a fait choix, et y reste tant quâelle sây cette fĂȘte est ou nâest point un jour de mariage ?.uoroTu lâas ditâ A. Quâest-ce que je vois lĂ en marge ?B. Câest une note, oĂč le bon aumĂŽnier dit que les prĂ©ceptes des parents sur le choix des garçons et des filles Ă©taient pleins de bonsens et dâobservations trĂšs-fines et trĂšs-utiles ; mais quâil a supprimĂ© ce catĂ©chisme, qui aurait paru Ă des gens aussi corrompus etaussi superficiels que nous, dâune licence impardonnable ; ajoutant toutefois que ce nâĂ©tait pas sans regret quâil avait retranchĂ© desdĂ©tails oĂč lâon aurait vu, premiĂšrement, jusquâoĂč une nation, qui sâoccupe sans cesse dâun objet important, peut ĂȘtre conduite dansses recherches, sans les secours de la physique et de lâanatomie ; secondement, la diffĂ©rence des idĂ©es de la beautĂ© dans unecontrĂ©e oĂč lâon rapporte les formes au plaisir dâun moment, et chez un peuple oĂč elles sont apprĂ©ciĂ©es dâaprĂšs une utilitĂ© plus
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